Dans quelques semaines, Suzane montera sur les planches de l’Olympia de Paris pour la deuxième fois en six mois. Mais l’autrice-compositrice-interprète française, qui fait sensation chez elle depuis trois ans avec sa musique électropop branchée sur la société, s’apprête à vivre un « premier rencard » avec le public québécois. Et elle espère que ce ne sera pas le dernier.

« J’adore l’idée de recommencer à zéro, nous dit-elle, attablée dans un café montréalais. J’espère qu’il y aura des gens pour venir à cette première rencontre vraiment précieuse. J’espère que ma musique va leur parler. »

On a rencontré Suzane plus tôt cette semaine, à quelques jours du spectacle qu’elle présentera ce samedi au Studio TD. Elle était à peine assise que la chaleureuse chanteuse nous racontait être venue au Québec en touriste il y a six ans pour visiter la sœur de son amoureuse. C’était son premier grand voyage à l’extérieur de la France, pendant lequel elle a mijoté son premier album Toï Toï – une chanson, Pas beaux, est même née lors d’une longue rando au mont Mégantic.

À l’image d’artistes comme Angèle, Suzane s’est d’abord fait connaître sur les réseaux sociaux avant de remporter un immense succès avec son premier album en 2020. La même année, la chanteuse, qui cumule les millions d’écoutes en ligne, a reçu le Victoire de la Révélation scène, puis elle a été sélectionnée comme interprète féminine en 2021, et a lancé un deuxième album attendu, Caméo, à l’automne 2022.

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Suzane, qui a reçu le Victoire de la Révélation scène en 2020, a déjà lancé deux albums.

Elle a aussi beaucoup tourné en France et à l’étranger, jusqu’en Chine, mais son passage à l’Olympia est dans une classe à part.

« La première fois, c’était irréel, alors je veux le faire pour la deuxième fois, pour être sûre que ça s’est vraiment produit ! Un rêve qui se réalise, je ne savais pas que ça pouvait faire autant d’effet. »

S’émanciper

L’histoire de Suzane n’était pas écrite d’avance : originaire d’Avignon, dans le sud de la France, Océane Colom se destinait plutôt à une carrière de danseuse – cours de danse dès l’âge de 5 ans, entrée au Grand Conservatoire de danse d’Avignon à 17 ans. « Danse classique, contemporaine, jazz… J’ai étudié le mouvement pendant très longtemps, à m’en écœurer, je pense. »

La « petite provinciale » décide un jour de tout lâcher et de monter à Paris pour tenter sa chance : elle a beau adorer sa ville natale, elle ne lui permet pas de « penser que tout est possible ».

Elle devient alors Suzane, tant pour rendre hommage à son arrière-grand-mère que pour s’émanciper d’Océane, « celle à qui on a dit tu seras celle qui ne s’exprimera pas, qui restera dans le chemin qu’on lui avait prévu ».

Mais dans un pays où le mouvement entre les classes sociales n’est pas fluide, Suzane tient à se rappeler d’où elle vient. C’est ce qu’elle se dit à elle-même dans la chanson Océane, qui ouvre son nouvel album : de ne pas se perdre en chemin, de ne pas oublier la petite fille de la classe moyenne qu’elle a été.

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« S’il y a un public pour moi ici, j’espère qu’il me trouvera », dit Suzane en parlant du Québec.

Aujourd’hui, je vais dans des endroits que je n’ai jamais vus, je sens que je ne suis pas dans mon monde. Mais ça me va, j’ai envie de me sentir libre partout ! Même si parfois on m’a fait sentir qu’Océane est moins bien que Suzane.

Suzane

À 32 ans, Suzane peut tout faire, comme elle l’avait rêvé : les gestes, la parole, la musique. Et la danse, qu’elle avait rejetée, fait maintenant partie intégrante de l’artiste qu’elle est. « Quand je ne danse pas, je ne suis pas bien dans mes baskets ! » C’est d’ailleurs ce que la chanteuse aime dans la musique électro : quand elle prend au corps, on n’a « pas le choix » de lâcher prise.

L’art pour faire avancer la société

Derrière la danse et la fête, il y a aussi une autrice qui soigne ses mots et parle du monde qui l’entoure. « J’écris beaucoup en réaction à ce que je vois, c’est la façon dont je me sens moins angoissée », explique Suzane, qui parle aussi de diversité sexuelle dans ses textes.

Mais quand on lui dit qu’elle est « trop engagée, trop lesbienne, trop féministe »… eh bien, elle n’est pas d’accord.

Moi, je trouve qu’il y a trop d’homophobie, trop de violence, trop de misogynie… Je réagis à cela, voilà ! Si je peux faire du bien à des gens en disant que l’amour c’est mieux que la haine, je ne me tairai pas.

Suzane

En écrivant Anouchka, une jolie chanson d’amour dédiée à sa compagne, ou sur le plaisir féminin dans Clit is good, la chanteuse est convaincue que l’art qui n’est pas édulcoré peut faire avancer la société.

« En France, je peux me marier, alors qu’il y a quelques années, je ne le pouvais pas. Les lois changent parce qu’il y a des chansons, des films, des gens qui représentent tout ça. »

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Suzane espère déjà revenir chanter au Québec.

La pandémie a retardé le projet de Suzane de venir chanter ici. Mais qu’à cela ne tienne : l’artiste, pour qui la scène est le lieu de rencontre ultime avec le public, a hâte de se présenter à ce premier rencard.

« Je crois au karma. Si ça doit arriver, ça arrivera. À mes premiers spectacles en France, il y avait 50, 70 personnes. Et trois ans après, je faisais l’Olympia au complet, quoi ! S’il y a un public pour moi ici, j’espère qu’il me trouvera. Et que je reviendrai pour mon troisième album encore plus forte. Et qu’on fera d’autres interviews. »

Ce samedi soir au Studio TD

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