Dans Mens-moi, son nouvel album qui sortira vendredi, Brigitte Boisjoli a pour la première fois de sa carrière écrit toutes ses chansons. Et elle a puisé dans son passé tourmenté d’amoureuse pour offrir une œuvre crue, enrobée de soul et livrée le cœur ouvert.

Depuis son premier album en 2011, Brigitte Boisjoli n’avait composé « qu’une phrase par-ci par-là », et elle n’avait jamais ressenti le besoin d’en faire davantage. Jusqu’à ce qu’elle ait un genre d’épiphanie lors d’un spectacle collectif, un peu avant la pandémie.

« Je suis partie de là et je me suis dit “eille, je suis tannée de chanter des covers” », raconte celle qui a fait un album hommage à Patsy Cline en 2015, un autre consacré à Plamondon en 2017, puis repris des succès country dans Women en 2019.

« Après cette soirée, j’ai sorti mon cahier Canada pour écrire des trucs, enchaîne-t-elle. Et crime, je trouvais ça pas pire ! Puis j’ai montré ça aux autres, et le monde me disait “c’est bon Brigitte, continue”. Je me suis fait confiance là-dedans. »

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Brigitte Boisjoli lance un album composé entièrement de chansons originales.

Verglas oblige, c’est par Zoom que nous avons discuté avec Brigitte Boisjoli la semaine dernière. Mais l’écran n’est pas une barrière pour son énergie vive et joyeuse, alors qu’elle nous raconte avec enthousiasme comment elle s’est transformée en autrice-compositrice-interprète, comment les mélodies ont « poppé » dans sa tête et qu’elle est arrivée en studio avec des idées très précises.

« Je n’ai pas fait tant d’essai-erreur. Les tounes que je faisais, c’était déjà presque un produit fini que j’entendais. » De là à dire que le processus a été facile, il n’y a qu’un pas… qu’elle ne franchit pas.

« J’ai vécu des journées de tourment », dit Brigitte Boisjoli, qui voulait écrire un album hyper personnel à partir de sa vie et de ses expériences. Ce qui l’a amenée à « replonger dans une couple d’affaires » qui ne lui faisaient pas du bien. « Des choses que je pensais réglées, mais en écrivant, je me disais : “Oh, regarde comment c’est pas réglé, ces affaires-là !” »

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Honnêteté

Mens-moi est un peu le journal intime d’une « amoureuse de l’amour » qui raconte sans détour les relations toxiques, la violence verbale, l’infidélité, le mensonge, les ruptures douloureuses, et dans lequel elle se met à nu. Elle confirme. « Ce n’est pas dans la douceur ! C’est un album relativement cru. »

Elle est en cela « teintée » par le parcours, l’honnêteté et la manière de « dire ces mots-là » de chanteuses comme Adele et Amy Winehouse. Elle les a beaucoup écoutées, ce qui s’est reflété dans son écriture.

Je ne passe pas par dix chemins quand je dis que j’ai mal, ou que j’ai eu mal. C’est sorti de même.

Brigitte Boisjoli

Même s’il y a eu des moments plus difficiles, Brigitte Boisjoli a fait la paix avec beaucoup de choses pendant l’écriture, comme si elle ouvrait la porte d’une thérapie. « Il y a beaucoup de chansons de résilience. C’est-tu la quarantaine qui fait ça ? Il me semble qu’on est plus résilient avec les belles et les moins belles choses. »

En tout cas elle en parle maintenant avec le sourire parce que « juste le dire, c’est déjà guérir le bobo ». Et elle connaît bien aujourd’hui la femme et l’amoureuse qu’elle est… et a été. Ce n’est pas pour rien qu’elle chante « Le chemin est long / Pour retrouver mon nom / Cette fois je prendrai le bon / Pour retrouver mon âme » dans la poignante Le chemin. Une pièce très soul… comme pas mal toutes les autres de l’album, qui se promène entre le gospel et le R&B.

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« Je me suis laissé carte blanche sur le son que ça allait donner. Comment ça sonne du Brigitte Boisjoli en 2023 ? Je ne le savais pas. Mais c’est là que c’est allé et c’est devenu ma ligne directrice. »

Elle a travaillé avec des artisans d’expérience, Jay Lefebvre à la composition puis Gauthier Marinof à la réalisation. Ils l’ont enveloppée « comme un gros gilet de laine confortable », mais surtout, ils ont été capables de comprendre ce qu’elle voulait, et de travailler vite et bien. « J’aime pas ça quand c’est long. Ça prenait quelqu’un qui clenche. »

Continuité

Brigitte Boisjoli a eu 40 ans en septembre… et a « braillé beaucoup ». « Je trouve que ça va vite. Je me vois vieillir et ça m’énerve. Mais j’accepte ces 40 ans. » Surtout qu’elle est dans une belle période professionnelle et qu’elle se sent mieux entourée que jamais. Mens-moi n’est peut-être pas un nouveau départ, mais c’est certainement une autre étape qui commence.

« Ce n’est pas mon premier barbecue, explique-t-elle. Mais je sens que c’est une continuité qui me ressemble plus. »

Des albums de reprises, il y en aura encore, tout comme des spectacles dans lesquels elle sera appelée à chanter du Céline Dion aussi bien que du AC/DC. Parce que Brigitte Boisjoli aime chanter « tout court », parce qu’interpréter à sa manière les chansons des autres est un métier qui la passionne.

Mais elle continuera aussi à écrire ses chansons parce que ça lui est « rentré dans le corps », et elle accueille le statut d’autrice-compositrice-interprète avec un sourire radieux et beaucoup de fierté, même si au début, elle se sentait un peu comme un imposteur.

Jamais je ne m’étais dit que ça me manquait. Je laissais ça aux autres, aux [Vincent] Vallières et Patrice Michaud de ce monde. Je m’étais classée comme interprète à vie et c’était ben correct. Puis j’ai eu cet appel, comme quand tu as l’appel d’être maman.

Brigitte Boisjoli

Elle espère que l’album fera son chemin jusqu’au cœur du public… et qu’il aura du succès ! « J’ai peur, si la critique n’est pas bonne… C’est super personnel ! Je me sens fébrile et fragile. »

Et elle aimerait que les gens en retiennent le message, qui est qu’on peut se sortir de relations toxiques. Elle en est la preuve, même s’il y a des blessures dont on ne guérit jamais vraiment, même si les moyens qu’elle a pris pour y arriver ne sont pas toujours les meilleurs.

« Mais je m’en suis sortie. Il y a de l’espoir. »

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