Sophie Grenier a souvent exprimé son amour du français à La voix. En entrevue deux jours après son triomphe en finale, la jeune femme de 17 ans assure qu’il n’y avait rien d’artificiel dans ses épanchements. Et pour cause ; la langue de Molière est celle qu’elle parle depuis toujours. « Quand ils entendent mon accent, les gens pensent que je suis anglophone, mais ma langue maternelle, c’est vraiment le français ! »

Voilà pourquoi la Franco-Ontarienne de 17 ans a hésité avant d’entonner Let’s Talk About Love de Céline Dion dimanche soir, en direct devant 1 321 000 téléspectateurs. Elle n’avait pas envie de confondre l’auditoire, qui l’avait adoptée depuis sa reprise de L’oiseau de René Simard aux auditions à l’aveugle. Lorsque son coach Mario Pelchat et l’équipe des Productions Déferlantes ont suggéré l’idée qu’elle inclue des portions de l’originale en français signée Jean-Jacques Goldman, la future gagnante a poussé un soupir de soulagement.

« Au début, j’étais vraiment craintive, raconte-t-elle. J’avais peur de faire une chanson en anglais, surtout que j’avais toujours chanté en français et que j’étais toujours comme : “J’aime le français”. J’avais peur qu’en faisant une chanson en anglais, les gens allaient [se dire] : “OK, c’était juste fake”. Mais en mélangeant les deux, j’étais confiante. »

Grande fan des artistes internationaux Billie Eilish, Aurora et Sleeping At Night, Sophie Grenier a également grandi en écoutant Céleste Lévis, Marie-Mai, Yseult, Louane, Pomme et Angèle. Pour elle, La voix représentait une chance inouïe de pousser la note en français.

« C’est sûr qu’en habitant à Ottawa, en Ontario, l’entourage est plutôt anglophone. Donc quand tu donnes des spectacles, c’est surtout en anglais. De pouvoir partager des chansons en français que j’écoute, j’ai aimé ça. Surtout quand c’est une langue qu’on essaie de protéger. »

Étincelle au karaoké

En décrochant une bourse de 50 000 $ et, surtout, un contrat de disque avec Musicor, Sophie Grenier se rapproche d’un rêve qu’elle caresse depuis plusieurs années : poursuivre une carrière en musique. L’étincelle s’est produite au cours d’un souper au restaurant karaoké, alors qu’elle avait 12 ans, après avoir chanté – « pour s’amuser » – A Thousand Years de Christina Perri.

« Après, la personne qui s’occupait du karaoké est allée voir ma mère pour lui dire : “Est-ce que votre fille prend des cours de chant ? Parce qu’elle devrait. J’entends beaucoup de potentiel.” »

Après quatre années de leçons et d’exercices pour développer son instrument, Sophie croit de plus en plus qu’elle atteindra son but, malgré certains revers. Elle s’est notamment remise en question après avoir tenté d’intégrer, en vain, la saison 2022 de Star Académie.

Pour faire carrière dans n’importe quoi, en sports, en musique… tu dois t’attendre à être rejeté plusieurs fois. Ça t’apprend la persévérance, aussi. Avec La voix, j’ai plus confiance en moi, en mon talent. J’ai plus d’assurance sur scène.

Sophie Grenier

Show ou business ?

Malgré sa récente victoire, Sophie Grenier hésite encore entre deux programmes de baccalauréat à l’université, qu’elle rejoindra en septembre : business (son « plan B ») et musique (son « plan A »).

Peu importe le choix qu’elle fera, Mario Pelchat salue son désir de poursuivre son parcours universitaire. « Moi, je n’ai pas fait beaucoup d’études, rappelle le chanteur. Ma sœur est décédée quand j’avais 15 ans, juste avant les Fêtes. Ça m’a marqué. On chantait ensemble. Après les vacances de Noël, j’ai essayé de reprendre, mais je n’y arrivais pas. J’ai lâché, et quelqu’un est venu me chercher pour faire du piano-bar. Au bout d’un an, j’ai gagné un concours, et c’était parti. Mais j’ai été chanceux. »

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE, LA PRESSE

Mario Pelchat et Sophie Grenier

« Mon manque d’études, je l’ai senti dans certains passages à vide, poursuit-il. Parce que mon père avait une compagnie de construction, je suis allé travailler en construction. Je connaissais le milieu. Encore une fois, j’ai été chanceux. C’est pour ça que j’encourage toujours les jeunes à aller chercher une base solide. »

Vite un album

Contrairement à certains anciens gagnants ou participants du concours de chant de TVA, Sophie Grenier n’a pas envie d’attendre longtemps avant d’enregistrer son premier album. Elle souhaite profiter du « momentum » pour commencer le travail ce printemps, en vue d’un lancement qu’elle espère hâtif.

Et contrairement au EP qu’elle a publié en janvier dernier, intitulé Escape et composé de quatre chansons en anglais, son disque comptera des titres uniquement en français, promet-elle.

À court terme, Sophie Grenier ira parfois rejoindre son coach Mario Pelchat sur scène au cours de l’été, lors des spectacles qu’il donnera au Domaine Pelchat Lemaître-Auger, le vignoble qu’il possède avec sa femme à Saint-Joseph-du-Lac, dans les Laurentides. Mario Pelchat préférant réserver la surprise aux détenteurs de billets, on ignore les dates exactes auxquelles la chanteuse montera sur scène. Mais chose certaine, ses parents seront présents, comme ils l’ont été au cours des deux derniers mois.

« On l’accompagne parce qu’on sait qu’elle est bonne, confie sa mère, Caroline Blanchard. Elle a une voix spéciale. De vivre cette aventure avec elle, c’est fantastique ! »