À sa manière discrète, Maude Audet s’est doucement taillé une place dans l’univers de la chanson québécoise. Elle lancera vendredi Il faut partir maintenant, cinquième album délicieusement orchestral, lumineux et empathique, dont elle a assuré pour la première fois la coréalisation.

« Je suis une autodidacte, d’un album à l’autre, mes compétences se sont accumulées. J’ai toujours été très impliquée dans la direction artistique, mais là, je me sentais prête à assumer ce rôle. »

Mais elle tempère tout de suite : tout cela n’est aussi qu’une affaire de « titre qu’on se donne » et ce qui est important, « c’est la finalité ». L’autrice-compositrice-interprète, qui aime le travail d’équipe, a ainsi coréalisé l’album avec Mathieu Charbonneau, d’Avec pas d’casque.

« Il y a tellement une partie solitaire dans notre travail. Ça fait vraiment du bien de lancer la balle à quelqu’un. » Surtout qu’ils se connaissent bien : non seulement il l’accompagne sur scène, mais c’est lui qui a réalisé Tu ne mourras pas, son précédent album. Il faut partir maintenant est d’ailleurs clairement dans la continuité, mais la musicienne estime que le défi est justement de se renouveler sans « casser » son style.

Extrait de Il faut partir maintenant

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Toujours inspirée par les années 1960 et 1970, Maude Audet a ainsi décidé d’y aller encore plus à fond dans les arrangements orchestraux. « J’adore ça. Mais c’est important que ce ne soit pas un pastiche du passé, que ça reste de la musique composée maintenant. »

Il y a en fait quelque chose de très classique dans la musique de Maude Audet, tant dans la langue utilisée que dans son folk qui vient puiser dans les racines de la tradition chansonnière. Elle acquiesce.

« Même si j’aime beaucoup l’orchestration et les arrangements, ça reste des chansons de trois minutes qui ont pour but de raconter quelque chose. »

Faire le tri

Si l’album s’intitule Il faut partir maintenant, c’est que la pandémie a été l’occasion pour la chanteuse, comme pour nombre d’entre nous, de faire des bilans.

« J’ai fait le tri dans ce qui est bon ou pas bon pour moi, dans mes aspirations, dans ce que je veux être comme artiste et comme humain. Il y a beaucoup de ça qui émane de ce disque. »

Extrait de Un soleil toujours

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Il y a de l’empathie aussi : dans plusieurs chansons, Maude Audet pose un regard bienveillant sur les autres, partage la peine et la douleur, offre son réconfort.

Je suis de plus en plus touchée par ce que les autres vivent. Dans cet album, il y a ce que j’ai vécu, mais aussi les choses dont j’ai été témoin. Je prends la position de la personne qui observe. Qui tend la main ou qui se sent impuissante.

Maude Audet

Si elle effleure des choses plus dures, cela ne l’empêche pas de faire le choix de la lumière. Éternelle optimiste, la chanteuse refuse de tomber dans l’ironie et le sarcasme. « On le sait que les choses vont mal. Mais qu’est-ce qu’on peut faire pour être heureux ? J’ai comme le goût de croire qu’on peut avancer, s’améliorer. »

Savoir s’entourer

Force tranquille : c’est ainsi qu’on la décrit souvent, et elle l’accepte en souriant. Même si elle se fâche des fois – « Demandez à mon chum et mes enfants ! » –, Maude Audet préfère la douceur à la colère, l’action aux paroles.

Elle est la première, par exemple, à avoir engagé une femme, Ariane Moffatt, pour réaliser son album Comme une odeur de déclin sorti en 2017. Et sur ce nouveau, elle s’est entourée de nombreuses musiciennes, que ce soit Marie-Pierre Arthur à la basse, Anna Frances Meyer à la flûte traversière ou Mélissa Lavergne aux percussions. « J’aime la mixité et l’ambiance que ça crée », dit celle qui a compris depuis longtemps que pour qu’il y ait du changement, elle doit en créer.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Maude Audet

Juste d’être plus sensible à ça, ça fait plus de place pour les femmes. Dans notre milieu, il y a eu une grosse prise de conscience. C’est beau, ce qui s’est passé.

Maude Audet

Quand elle regarde le chemin parcouru depuis sa participation aux Francouvertes en 2013, Maude Audet est fière. Celle qui a quitté une carrière de scénographe de théâtre pour la musique n’aurait jamais cru se retrouver un jour avec cinq albums à son actif.

« J’ai commencé, mes enfants étaient bébés. On était dans une situation très précaire. Je me dis que j’y ai vraiment cru, à cette affaire-là. Que quelque chose m’appelait, vraiment. » Elle peut maintenant se dire chanteuse « sans être gênée » ni ressentir de syndrome de l’imposteur comme avant, et assume que l’artiste qu’elle est est faite de toutes ses expériences passées. « Je me rends compte que c’est un bagage et j’essaie de l’exploiter. On a tous nos chemins, et ils sont tous valables. »

Maude Audet repartira bientôt en tournée et est bien contente du retour à la normale. Surtout que son précédent album, sorti en février 2020, a subi les contrecoups des mesures sanitaires. Elle se souvient d’avoir fait des spectacles devant des salles de 30 personnes masquées… « Je n’en reviens pas de la générosité des gens. »

Extrait de Je danse

Cette fois, comme elle aime toujours essayer, et avancer, elle a décidé de travailler avec la chorégraphe Karine Ledoyen, avec qui elle a collaboré pour le clip de sa chanson Je danse.

« Il y aura des moments où je ne serai pas juste derrière ma guitare. Toujours dans cette idée de me faire confiance et de prendre ma place. On s’entend, je ne suis pas Beyoncé ! Mais j’ai besoin d’un défi de plus. »

Il faut partir maintenant

Folk

Il faut partir maintenant

Maude Audet

Bravo Musique
Album disponible vendredi