Le hautboïste Vincent Boilard et le Quatuor Molinari exhument des partitions oubliées et souvent passionnantes de compositeurs canadiens.

Dans le livret de son premier disque, réalisé en compagnie du Quatuor Molinari pour ATMA, le hautbois solo associé de l’Orchestre symphonique de Montréal Vincent Boilard cite ces mots de son collègue hongrois Lajoc Lencsés : « Je veux enregistrer des pièces totalement inconnues qui dorment quelque part […] simplement pour leur permettre d’exister. Il faut les enregistrer pour qu’on puisse les écouter et s’y intéresser. Sans enregistrement, ces pièces n’existent pas. Si la musique n’existe que sur papier, elle meurt. »

La noble quête de Boilard l’a porté vers le répertoire canadien pour quatuor à cordes et hautbois, une formation qui est loin de courir les rues. Le musicien a tout de même déniché quatre partitions de compositeurs anglophones issus de la même génération (ils sont nés entre 1942 et 1948) : Stewart Grant, Elizabeth Raum, Michael Parker et Brian Cherney. Tous sont encore en vie, à l’exception de Parker, disparu en 2017.

Avait-on raison, finalement, d’exhumer ces œuvres composées entre 1987 et 2000 ? L’intérêt est croissant à mesure qu’avance le disque. La Serenata da Camera du chef et hautboïste Stewart Grant, qui ouvre l’album, est relativement oubliable. Il est entendu qu’une sérénade garde un caractère plutôt léger, mais le matériau mélodique et harmonique n’est pas d’un très grand intérêt.

On est déjà à un autre niveau avec Searching for Sophia de la très prolifique Elizabeth Raum, également hautboïste professionnelle. L’idiome est encore plutôt romantique, mais l’inspiration orientale avouée (les grands-parents de la compositrice étaient syriens) confère aux trois mouvements une saveur particulière.

Aussi en trois mouvements, Requiem parentibus, composé après la mort du père de Michael Parker, nous amène complètement ailleurs. L’altiste, dont la carrière s’est essentiellement déroulée à Terre-Neuve, y déploie des harmonies somptueuses dans un climat qui rappelle souvent l’École de Vienne. Le hautbois est aussi nettement plus intégré au sein des cordes que dans les œuvres précédentes.

In the Stillness of the Summer Wind de Brian Cherney, professeur à l’Université McGill depuis les années 1970, réussit quant à lui à nous transporter dans un autre monde avec une remarquable économie de moyens.

Boilard et les Molinari jouent tout cela avec un admirable engagement et un contrôle de la sonorité toujours adapté aux intentions musicales.

L’acoustique de l’église Saint-Augustin de Mirabel est peut-être cependant moins appropriée pour ce genre de formation instrumentale et de répertoire, les passages marcato perdant en impact à cause de la réverbération.

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Lumières nordiques

Musique classique

Lumières nordiques

Quatuor Molinari et Vincent Boilard

ATMA Classique

7,5/10