Ce serait le récit de voyage le plus plate qu'on a jamais lu s'il n'était traversé par cette petite angoisse du narrateur qui se sent coupable tout le long d'avoir oublié de donner un pourboire à un employé lors de son séjour au Mexique.

Car Le pourboire, premier roman du poète Philippe Chagnon (Coeur takeout, Arroser l'asphalte), raconte, avec une infinité de détails insignifiants, le premier voyage d'un gars avec ses parents et sa blonde dans un lieu touristique comme il y en a des milliers dans le monde.

On a droit à tout, mais absolument tout, des bagages à l'aéroport en passant par le menu dans l'avion et les films sur l'écran tactile, chaque drink de l'hôtel, les excursions de groupe, jusqu'au spleen du retour à la maison.

C'est long longtemps, comme une nouvelle gonflée artificiellement pour faire un roman. Mais il y a ce pourboire oublié qui fait faire au narrateur des cauchemars mille fois plus vivants que son existence.

Cette calvitie de plus en plus visible qui le désespère. Cette tension entre ses parents, vieux couple miroir du sien (il vient de se fiancer) qui risque d'avoir la même destinée: se disputer au Mexique une fois par année.

On ne s'étonne pas de découvrir que le narrateur, pendant ses vacances, lit Sérotonine de Houellebecq.

«J'ai adoré», c'est tout ce qu'il en pense, quand il le finit juste avant l'atterrissage au retour. C'est à se demander si ce roman n'est pas une blague, trop étirée, contre Houellebecq, finalement.

* * 1/2

Le pourboire. Philippe Chagnon. Triptyque. 110 pages.