L'écrivain français Éric Fottorino, ancien directeur du journal Le Monde, avait déjà affirmé en entrevue qu'«écrire est toujours une manière de s'humilier, de s'exposer au jugement».

On pourrait supposer que ce nouveau roman incarne, à travers le personnage de Norman Jail, sa conception complexe de l'écriture, devenue pour le vieil homme son unique compagnie.

À 80 ans, Norman Jail n'a publié qu'un seul roman mais possède une bibliothèque remplie de cahiers noircis par les mots - des livres «mort-nés» qu'il n'a jamais envoyés à des maisons d'édition. Car pour cet homme qui a tout sacrifié pour ses livres, la réécriture est une forme d'automutilation, explique-t-il à la narratrice, une jeune femme venue le rencontrer sous prétexte de rédiger un mémoire de littérature.

Norman Jail se délecte à jouer avec les mots et transporte son interlocutrice dans son univers solitaire. Leurs échanges sur l'écriture, quoique d'une richesse et d'une sensibilité inouïes, finissent toutefois par tourner en rond. Mais au bout de ce qui semble être, par moments, une longue route dont on n'entrevoit pas la fin, un rebondissement déconcertant et magistral nous surprend à la ligne d'arrivée.

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Trois jours avec Norman Jail. Éric Fottorino. Gallimard, 208 pages.