De l'emprisonnement de gens sans histoire pendant la crise d'Octobre, on a fait un très beau film (Les ordres). Pour les familles italiennes dont le père a été interné injustement au camp de Petawawa, le drame a été vécu dans un silence obligé, souligne l'artiste Sylvie Laliberté, dans ce très beau récit sur sa mère et sa famille: «J'ai grandi dans un chagrin, dans une histoire que l'histoire ne reconnaît pas.»

Les comptes bancaires gelés, les fouilles répétées de la maison. Et le pire, peut-être, les enfances brisées par l'humiliation infligée par des soeurs enseignantes.

De ceux qui ont subi des injustices, on aime souvent saluer l'absence de rancoeur. Sylvie Laliberté ose - heureusement - exprimer sa colère. Car la part italienne d'elle-même est toujours souffrante, a toujours honte. On peut s'en étonner maintenant qu'il est de bon ton de connaître l'huile d'olive et le «fromage qui pue». Mêlant remarques mordantes et candeur quasi enfantine, son court récit est entrecoupé de photos de famille dont la douceur tranche avec le propos («ils ne se seront pas mis beaux pour rien»!). Touchant et nécessaire.

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Quand j'étais italienne, Sylvie Laliberté, Somme toute, 96 pages.