Nicolas Fargues avait habitué ses lecteurs aux drames amoureux (J'étais derrière toi) ou aux satires modernes (One Man Show). Il surprend et bouleverse là où ne l'attend pas dans Tu verras, douloureux roman antiboboïsant sur la pire épreuve que doit surmonter un homme: la perte accidentelle de son fils.

Colin, 38 ans, vient de perdre son fils, Clément, 12 ans, de la façon la plus bête et la plus cruelle qui soit. Tu verras est la mise à nu de cet homme à qui il ne reste plus rien, laissé dans sa solitude par un père et une compagne bien trop lâches pour comprendre l'absence.

Nicolas Fargues n'épargne pas ses contemporains, et surtout pas ce Colin dont la presse française a vu des ressemblances avec l'auteur. Narrateur attachant, Colin, après le drame, jette sur sa vie, sa médiocrité, ses bassesses, ses lâchetés, un regard cru et sans fard.

«Je songeais que, paradoxalement, c'est maintenant que Clément était mort que je trouverais tout naturellement la volonté de mettre un terme à cette médiocre association, où même le sexe ne se pratiquait plus que sur les bases d'un malentendu», écrit-il.

La force de Tu verras est d'éviter malgré tout le pathos au profit d'une justesse dans les sentiments énoncés. Du livre se dégage l'autoportrait d'un homme rompu, mais aussi une dissection attentive de l'amour filial et des relations parents-enfants trop souvent sacrifiées au profit d'occupations bien vaines.

Un roman brut et saisissant.

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Tu verras. Nicolas Fargues. Éditions P.O.L, 194 pages.