Les dames du prix Femina ont couronné mardi ce roman sur les souffrances de l'amour au masculin.

Murphy est un Américain travaillant dans la City de Londres. Louis Blériot (comme l'aviateur) est un traducteur pigiste sans envergure anesthésié par son mariage avec une femme à la carrière florissante.

Tous deux aiment Nora, une jeune Anglo-Française narcissique et impulsive, qui a l'ambition de devenir actrice et l'habitude de quitter les hommes sans avertissement. Tandis que Murphy l'attend, comme Blériot avant lui, les deux autres flambent leur amour comme le fric, dans une insouciance adolescente.

Blériot se laisse porter, tiraillé entre «l'angoisse de l'infidélité et la dépression de la fidélité». Ô souffrance de savoir sa maîtresse volage...

On exclut ici plus ou moins le point de vue de l'épouse légitime, dont il n'arrive pas non plus à séparer. Professeur de lettres, Patrick Lapeyre dit s'être inspiré du rythme et de l'emportement des amants de Manon Lescaut.

Le charme de son roman tient beaucoup à la sensation de flottement imposée par le narrateur, qui décrit l'agitation des personnages comme s'il s'agissait d'astronautes dans leur bulle ou de bestioles dans leur éprouvette. Il joue à suspendre le temps, laissant les sentiments se déployer dans l'espace. Le cocasse fait irruption dans des moments difficiles, tout comme les références littéraires.

Le dernier chapitre, étonnant, pousse encore plus loin la distorsion spatio-temporelle, comme si les amoureux et leurs histoires pouvaient être ainsi et tout autre à la fois.

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* * * 1/2

La vie est brève et le désir sans fin. Patrick Lapeyre. P.O.L., 345 pages.