Dans les premières pages de Mes alliances (version française de Committed, paru en janvier 2010 dans sa version originale), Elizabeth Gilbert annonce comme un avertissement qu'il lui a été difficile de retrouver sa voix d'écrivain, après l'immense succès de Mange, prie, aime.

Pas seulement parce que son récit d'une année autour du monde a rallié des millions de fans qui s'inspiraient d'elle pour changer de vie. Mais aussi parce qu'avec son amoureux Felipe - le fameux Brésilien rencontré à Bali, dans le dernier chapitre de Mange, prie... - elle vivait une histoire heureuse, mais déchirante. Vivre en couple avec un compagnon étranger, évoque l'amie Liz, n'est pas le mode de vie le plus recommandable en sol américain.

Toujours est-il que lorsque Felipe a été forcé de quitter le sol américain - pour toutes sortes de raisons liées à l'immigration américaine - Liz Gilbert se retrouve face à un ultimatum: si elle veut vivre auprès des siens en Amérique, il lui faut épouser son compagnon. Pour une fille de presque 40 ans qui a vécu un divorce aussi douloureux que ruineux, voilà une décision qui ne se prend pas dans un élan de romantisme.

Liz et Felipe, pendant une année, sont donc forcés de vivre leur union naissante en exil, le temps que l'immigration s'occupe des papiers de Monsieur. Le couple décide de passer ce temps en Asie du Sud-Est, et Gilbert profite de cette période pour plonger dans une étude à la fois anthropologique, historique et personnelle sur le «sens» du mariage, à notre époque où la liberté individuelle et occidentale révolutionne les raisons de s'unir pour le meilleur et pour le pire.

On retrouve, dans Mes alliances, le ton plein d'humour, investi et empreint de compassion de celle qui a rejoint des millions de lectrices. Se dédouanant de toutes prétentions scientifiques, Elizabeth Gilbert ouvre néanmoins plusieurs pistes de réflexion sur la pertinence et la viabilité du mariage, à une époque où les valeurs traditionnelles ou les considérations économiques n'ont plus autant de prises sur l'institution du mariage. Se penchant sur le mariage gai dans les pays occidentaux et explorant la notion de mariage arrangé dans certaines sociétés asiatiques, elle ratisse large. Une approche qui n'est pas sans qualité, mais donne aussi une confusion des genres et un certain manque de rigueur.

Elle a fini par se marier, Liz Gilbert. Espérons qu'elle et Felipe vivront longuement heureux et ensemble. Avec Mes alliances, on sent que la page de la quête personnelle est tournée pour cette auteure qui a commencé par la fiction et compte y retourner.

___________________________________________________________________________

* * *

Mes alliances, histoires d'amour et de mariages. Elizabeth Gilbert. Calmann-Lévy.