Pierre-Luc Brillant vient tout juste de lancer le disque Comme dans un film, sur lequel il chante en duo avec son amoureuse Isabelle Blais des chansons de leur cru. À la télé, on peut toujours voir le comédien dans Au secours de Béatrice, et il sera aussi sur les planches du Propero dans Les ossements du Connemara du 8 au 26 novembre.

Votre premier souvenir de lecture?

Le crabe aux pinces d'or. Les aventures de Tintin ont façonné l'imaginaire de mon enfance tout en contribuant à piquer et à développer sérieusement ma curiosité pour les enjeux géopolitiques mondiaux. Encore aujourd'hui, je suis fasciné par la construction sans faille et somme toute assez complexe des récits de Hergé. Signe ultime du grand génie de l'auteur, ces BD d'une «autre époque» n'ont pas vieilli d'un poil.

Le livre qui a changé votre vie?

Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline. Lu pour la première fois à 16 ans, ce chef-d'oeuvre de l'histoire humaine (tous arts confondus) a gravement changé ma perception de la vie. Céline y dépeint sans compromis la réalité de la misère humaine dans un style empreint d'un humanisme sans fond, d'une envergure poétique rarement égalée dans l'histoire de la langue française. C'est une ode profonde à la vie, à la dignité humaine. On ne peut que désirer vivre et créer après un tel voyage.

Le livre qui est sur votre table de chevet en ce moment?

Ils ont couru l'Amérique de Marie-Christine Lévesque et Serge Bouchard. Recueil de récits fascinants sur quelques coureurs des bois qui ont exploré le territoire de l'Amérique française. Pourquoi n'enseigne-t-on à peu près rien de la vie de ces personnages épiques dans nos écoles? Il est difficile de ne pas en déduire qu'on tient à ne pas glorifier notre passé aux yeux de nos enfants. Si j'avais appris les aventures extraordinaires de tous ces pionniers sur les bancs de la petite école, la fierté d'être qui je suis aurait pris le pas sur la conception un peu douteuse, basée sur la honte et l'échec, que je me faisais de notre histoire nationale dans ma tête d'enfant.

Le livre que vous relisez tout le temps?

Comment Grandgousier congneut l'esperit merveilleux de Gargantua à l'invention d'un torchecul. En fait, il s'agit du chapitre XIII de La vie très horrificque du grand Gargantua que je lis et relis chaque fois que je cherche à retrouver l'esprit de la langue française. On y apprend comment fut inventé le «papier de toilette» (torchecul) en des temps légendaires... Ça ne cesse de m'étonner et de me faire rire. La quintessence du français. La langue de Rabelais est une des choses les plus absurdes, désinvoltes, belles, délectables et pures qui soient. Ce texte est aussi un superbe exercice d'interprétation lorsqu'on le lit à voix haute !

Celui que vous n'avez jamais lu, vous ne savez pas pourquoi?

À la recherche du temps perdu de Proust. J'ai beaucoup discuté de cette oeuvre à une autre époque avec un ami aujourd'hui disparu. Il y a sans doute là un début d'explication à ma réticence de lire cet incontournable monument de la littérature.

Ce que vous avez l'intention de lire cet automne?

Genèse de la société québécoise de Fernand Dumont. Avec l'arrivée de Jean-François Lisée à la tête du Parti québécois, du mouvement est à prévoir dans le paysage politique québécois, et sans doute beaucoup de chasses aux sorcières... Il est donc hautement pertinent de retourner intellectuellement à la genèse de ce qui nous a construits comme nation, au concept même de québécitude. À ce sujet, les écrits du grand Fernand Dumont s'avèrent être, encore aujourd'hui, parmi les plus respectés et incontournables chez les intellectuels de toutes allégeances politiques.