La rumeur veut qu'une adaptation cinématographique ne soit jamais à la hauteur du livre dont elle est tirée. Un long métrage de fiction dépasse parfois les attentes, du moins selon l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences, dont la cérémonie de remise des Oscars a eu lieu dimanche soir. Voici six romans «oscarisés», dont trois par le champion des adaptations, le cinéaste Ang Lee.

Misery

Roman de Stephen King (1987). Film de Rob Reiner (1990). Oscar de la meilleure actrice pour Kathy Bates.

Après avoir adapté avec succès une novella de Stephen King, The Body, qui a donné au cinéma Stand by Me (1986), le cinéaste Rob Reiner remet ça avec Misery, un roman d'horreur psychologique. King s'était inspiré de ses nombreux fans qui exigeaient toujours plus d'horreur dans ses romans. Il disait aussi combattre à l'époque des problèmes de toxicomanie. Dans le film, Kathy Bates s'avère une fan maniaque plus que convaincante.

Sense and Sensibility (Raison et sentiments)

Roman de Jane Austen (1811). Film d'Ang Lee (1995). Oscar de la meilleure adaptation pour Emma Thompson (qui joue également dans le film). Six autres nominations.

Le roman publié anonymement était le premier de la grande auteure anglaise Jane Austen. Succès immédiat en Angleterre, traduit dès 1815 en français, il parle de la condition des femmes, d'amours et de rêves brisés. Au cinéma, Ang Lee possède une sensibilité certaine pour l'adaptation de romans (Tigre et dragon, Ice Storm). Il adopte un traitement classique, mais d'une grande beauté visuelle avec la crème des interprètes anglais.

The English Patient (Le patient anglais)

Roman de Michael Ondaatje (1992). Film d'Anthony Minghella (1996).

Neuf Oscars, dont meilleur film, meilleur réalisateur et meilleure actrice, Juliette Binoche dans le rôle d'une infirmière canadienne-française.

L'auteur canadien Michael Ondaatje a écrit beaucoup de poésie, mais son troisième roman, The English Patient, lui a valu le prestigieux Booker Prize en 1992. Le livre, qui se promène entre les époques, représentait le matériel idéal pour une adaptation avec flashs avant et arrière. Feu l'Anglais Anthony Minghella en a fait un brillant film de montage avec plusieurs acteurs de premier plan.

Brokeback Mountain

Nouvelle d'Annie Proulx (1999). Film d'Ang Lee (2005). Trois Oscars, dont meilleur réalisateur et meilleure adaptation.

La décision de ne pas accorder l'Oscar du meilleur film à Brokeback Mountain est considérée comme une erreur entachée d'homophobie par plusieurs experts. La touchante adaptation d'Ang Lee méritait beaucoup mieux. La nouvelle d'Annie Proulx (auteure américaine dont le père venait du Canada) était d'abord parue dans le magazine The New Yorker en 1997. Elle a été incluse dans son recueil de nouvelles Close Range - Wyoming Stories, finaliste aux prix Pulitzer.

No Country for Old Men

Roman de Cormac McCarthy (2005). Film de Joel et Ethan Coen (2007). Quatre Oscars, dont ceux du meilleur film et de la meilleure adaptation.

Le roman a valu à Cormac McCarthy le titre de «meilleur écrivain américain vivant» selon un critique de Houston. Les frères Joel et Ethan Coen sont également classés parmi les meilleurs cinéastes de leur époque. Le film leur a valu leur tout premier Oscar du meilleur film, même s'ils avaient été primés auparavant, autant à Cannes qu'à Hollywood, pour leur travail de scénarisation, notamment.

Life of Pi (L'histoire de Pi)

Roman de Yann Martel (2001). Film d'Ang Lee (2012). Quatre Oscars, dont celui de la meilleure réalisation.

«C'est le livre qui est célèbre, pas moi», nous disait récemment le romancier québécois Yann Martel à propos du livre lui ayant valu le Man Booker Prize. Avec des recettes aux guichets de plus de 150 millions de dollars, le film est tout aussi populaire. Certains ont accusé le film de ne pas être fidèle aux aspects philosophiques du roman, mais il s'agit néanmoins d'une spectaculaire adaptation cinématographique, concrétisant la réputation d'Ang Lee comme «meilleur cinéaste-lecteur de romans».