Justin Torres raconte dans ce premier roman l'enfance de la «bête à trois torses», ainsi qu'il appelle le trio de sales garnements qu'il formait avec ses deux frères.

C'est un «on» qui raconte, tant les trois enfants semblent être fusionnés en un seul dans le récit des jeux, dans le regard qu'ils portent sur leurs parents négligents, aimants ou violents. La mère travaille de nuit et sert le dîner à l'heure du réveil, le père disparaît pendant plusieurs jours ou achète un pick-up en guise de voiture familiale. Au milieu de ce chaos, les trois gamins se font exploser des tomates au visage, font des doigts d'honneur aux autres enfants blancs - leur père est portoricain - ou font le pari de casser la vitre du camping-car des voisins.

L'écriture rythmée de Torres se distingue par un style bien personnel, où la fantaisie de l'imagination donne une couleur poétique aux souvenirs évoqués. Cela aurait pu être le récit complaisant d'une enfance difficile. Au contraire, la légèreté du regard, non dénué de nostalgie, que le narrateur pose sur cette vie «animale», sauvage, constitue, on le comprend à la fin, son instinct de survie. Les lecteurs qui privilégient le style à l'histoire sortiront admiratifs de ce court roman.

Vie animale

Justin Torres

Éditions de l'Olivier 144 pages

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