Proclamé auteur phare de la nouvelle littérature russe à la suite de la parution d'un premier roman salué par la critique, Pavel Sanaïev, finaliste du Booker Prize russe, voit aujourd'hui son roman Enterrez-moi sous le carrelage traduit en français, aux Éditions Les Allusifs.

Ce livre, petite merveille grinçante certes, mais ô combien jouissive, donne voix à Sacha, garçonnet de 9 ans élevé par sa grand-mère névrotique qui le couve d'un amour étouffant prenant la forme de traitements médicaux des plus aliénants. Ainsi, l'enfant n'a pas le droit de suer, doit être constamment emmitouflé par crainte des courants d'air et subit de façon hebdomadaire des tests de dépistage, de la prise de sang au lavement, en passant par l'électrocardiogramme et l'ultrason des reins. Despote déchaînée et dangereuse pour la santé mentale de son petit-fils qu'elle garde sous sa coupe, l'aïeule avance néanmoins dans son délire avec un aplomb qui frôle ici le burlesque. L'imagination morbide de celle-ci y côtoie l'imagination déviée de l'enfant sous son joug.

 

C'est alors que l'auteur profite ingénieusement de la situation pour laisser planer le doute alors que la table est mise, laissant entrevoir le point de vue de la vieille en changeant magistralement de ton. L'enfant est-il réellement malade? La mère serait-elle sérieusement inapte? Tous deviennent donc à la fois odieux et touchants dans ce bal des monstres où rien n'est ce qu'il paraît et où la «maladie» se transmet bel et bien de mère en fils...

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Enterrez-moi sous le carrelage

Pavel Sanaïev

Les Allusifs, 272 pages, 29,95$

***1/2