Surtout, ne vous fiez pas au titre. C'est une astuce habile, peut-être une métaphore qui a, somme toute, peu à voir avec un drame africain qui laisse l'Occident de glace, mais qui aigrit Henning Mankell.

Louise Cantor dirige des fouilles archéologiques à Argos, en Grèce. C'est l'automne, on s'apprête à fermer le chantier pour l'hiver. Louise ne rêve que de rentrer en Suède voir son fils unique, dont elle est sans nouvelles. Arrivée à Stockholm, elle le trouve sans vie dans son lit, vêtu d'un pyjama.

 

La police conclut au suicide: dose massive de barbituriques. Louise est persuadée qu'il a été assassiné. Henrik dormait toujours nu. Mais le connaît-elle vraiment, ce fils qu'elle a élevé seule, son père étant disparu il y a de cela déjà bien des années?

Son premier réflexe sera d'ailleurs de le retrouver, ce qu'elle parviendra à faire grâce au concours du narrateur, qui lui facilitera la tâche car c'est ailleurs qu'il veut entraîner le lecteur.

Mankell campe bien le personnage de Louise et de son drame, mais il l'utilise surtout pour nous ouvrir les yeux sur la pandémie du sida qui saigne l'Afrique, dont la pauvreté sert de terreau à d'horribles expériences.

Louise et Aron retourneront donc dans l'appartement d'Henrik. Crack en informatique, Aron percera certains pans de la vie secrète de leur fils: il recevait beaucoup d'argent, possédait un appartement à Barcelone et s'intéressait au mystère entourant la disparition du cerveau de Kennedy.

À Barcelone, la concierge, qui aimait bien Henrik, leur confie qu'il avait une autre maîtresse au Mozambique et qu'il était séropositif. Louise sait qu'elle doit y aller pour comprendre, mais voilà qu'Aron disparaît encore.

C'est en proie à la peur qu'elle débarque à Maputo, où elle sera tout de suite agressée.

Louise rencontrera Lucinda, la maîtresse de Henrik, elle aussi séropositive. Nouveau choc pour Louise: elle apprend que c'est Henrik qui l'a contaminée. Elle ne lui en veut pas, car il cherchait à percer ce qu'une mystérieuse clinique philanthropique faisait avec les malades qui venaient y mourir.

Louise s'y rend, effleure l'horreur et craint pour sa vie. Elle rentre précipitamment en Suède, mais voilà que Lucinda la rappelle pour lui livrer un ultime secret avant de mourir. Louise comprend qu'après Henrik, Aron et Lucinda, c'est à son tour d'essayer de briser l'indifférence.

Même si Mankell recourt encore à la technique de l'enquête qui a fait le succès de la série Kurt Wallander, il dépasse le roman de genre. «C'est la colère qui m'a poussé à écrire», dit-il.

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Le cerveau de Kennedy

Henning Mankell

Seuil, 392 pages 34,95$

*** 1/2