La mort du père entraîne bien souvent une remise en question de l’ordre des choses, au sein d’une fratrie. Ce nouveau titre d’Olivier Adam se penche sur les retrouvailles de Claire, Antoine et Paul dans la maison de leur enfance, à l’occasion des obsèques paternelles.

Le roman se déploie sur trois jours, de la veille de l’enterrement de leur père jusqu’au lendemain. C’est la première fois depuis longtemps que les frères et la sœur y sont réunis, à la grande joie de leur mère qui se réjouit de voir ses enfants enfin ensemble, malgré les circonstances.

Pourtant, c’est l’heure des comptes entre Claire, Antoine et Paul, l’enfant du milieu, imprévisible et attendu de pied ferme. Car Paul, qui s’est éloigné des siens depuis la jeune vingtaine, est accusé par son frère et sa sœur d’avoir déformé l’histoire familiale pour écrire ses films et ses pièces de théâtre. Claire le tient même responsable de la « fissuration » de la famille pour avoir coupé les ponts avec son père.

« Une famille, c’est un ensemble. Tu l’amputes d’un membre, elle n’existe plus », lui dit-elle d’ailleurs avec véhémence, alors que Paul se plaît à rappeler de son côté les mots de Philip Roth — « un écrivain dans une famille, c’est la mort de cette famille ».

Les deux frères, eux, s’échangent les coups dans une joute verbale d’où transpirent la rancœur et la jalousie — et malgré tout, une certaine nostalgie de leur enfance sous le même toit.

C’est un portrait très juste des dynamiques familiales que dépeint l’écrivain français, et toute la force du roman tient précisément dans la finesse de ces dialogues enflammés entre frères et sœur. L’alcool, la fatigue et l’émotion aidant, les langues se délient enfin, après des années de silence et de non-dits. On découvre ainsi la source des discordances dans la mémoire familiale de chacun, de même que les rôles qu’ils se sont eux-mêmes forcés à endosser au fil des ans et qu’ils continuent de jouer à leur insu.

Olivier Adam explore également avec une grande délicatesse les fluctuations de notre rapport au temps qu’entraîne le deuil du père, et qui précipitent les changements existentiels et les prises de décision. Ce qu’il parvient par-dessus tout à montrer, c’est qu’au bout du compte, même les liens du sang ne sont pas assez forts, parfois, pour empêcher les êtres de dériver loin de leur port d’attache et de poursuivre leur propre chemin.

Dessous les roses

Dessous les roses

Flammarion

248 pages

7/10