(Madrid) La romancière russe Ludmila Oulitskaïa, engagée contre Vladimir Poutine et souvent pressentie pour le Nobel, a reçu jeudi le prix Formentor pour l’ensemble de son œuvre, a annoncé le jury de ce prix littéraire.

La romancière de 79 ans a été récompensée « pour le souffle narratif puissant avec lequel elle enregistre les émotions les plus subtiles de l’âme humaine, pour la sensibilité avec laquelle elle raconte l’épopée de personnes jetées dans le labyrinthe du monde, pour la délicatesse avec laquelle elle réhabilite la dignité d’hommes et de femmes soumis au sort despotique du malheur », a indiqué le jury dans un communiqué.

Éprise de liberté d’expression, Ludmila Oulitskaïa est l’une des rares écrivaines russes contemporaines à avoir conquis un public étranger.

Aimant tenir tête au Kremlin, en défendant les opposants emprisonnés ou poursuivis, elle a quitté la Russie quelques jours après l’invasion de l’Ukraine le 24 février qu’elle dénonce régulièrement.

La guerre en Ukraine « ça m’a tuée […] Je suis née pendant la guerre, sous Staline, et j’espérais mourir sans avoir vu la prochaine. Bien sûr, il y avait toutes ces petites guerres en permanence, la Tchétchénie, l’Ossétie du Sud… Mais ce qui se passe aujourd’hui est inimaginable », a-t-elle déclaré au journal français Le Monde dans un entretien publié mercredi.

Née en 1943 dans l’Oural où ses parents avaient été évacués pendant la guerre, Ludmila Oulitskaïa a ensuite grandi à Moscou et fait des études de biologie et de génétique.

En 1970, époque où le dirigeant soviétique Léonid Brejnev impose un contrôle draconien sur la vie politique, idéologique et culturelle en URSS, elle perd sa chaire de génétique en raison de sa proximité avec des dissidents.

C’est après avoir perdu son travail qu’elle se lance dans la littérature, devenant l’auteure prolifique de romans, nouvelles, pièces de théâtre et scénarios de films.

Ses premiers livres Les pauvres parents et Sonietchka ont été publiés en France avant de trouver un éditeur en Russie.

Les œuvres de Ludmila Oulitskaïa ont depuis été traduites dans de nombreuses langues et couronnées par de prestigieux prix littéraires dans le monde, y compris en Russie.

Fondé par un groupe d’éditeurs européens renommés, le prix Formentor est doté de 50 000 euros (68 000 $).