François Ricard, éditeur, essayiste, professeur de littérature et grand spécialiste de l’œuvre de Gabrielle Roy, n’est plus.

L’annonce en a été faite vendredi après-midi par les Éditions du Boréal, avec qui M. Ricard était associé depuis 1983. Il y dirigeait la collection Papiers collés.

« François était un de nos grands intellectuels dans la cité, nous a dit Pascal Assathiany, directeur général de la maison d’édition. Il faisait partie de ces intellectuels qui ne restent pas dans leur tour d’ivoire. Ils sont plutôt dans l’espace public. Ils font des livres. Ils ont été journalistes. Ils sont intéressés par l’histoire et regardent la société. Et ils transmettent le goût de la littérature aux jeunes. »

Joint par La Presse, le romancier et cinéaste Jacques Godbout, qui était président du Boréal jusqu’à l’an dernier, a déclaré : « Il avait une intelligence remarquable. Une intelligence des textes. Il savait lire, analyser, comprendre, expliquer. Ce qui a fait de lui, probablement, un très bon professeur. J’ai vu comment il réagissait à des manuscrits, et s’il fonctionnait de la même manière en classe, ça devait être assez extraordinaire. »

François Ricard, né le 4 juin 1947 à Shawinigan, a étudié à l’Université McGill avant d’aller faire un doctorat en littérature à l’Université d’Aix-en-Provence en 1971.

À son retour au Québec, il a enseigné la littérature française et québécoise à l’Université McGill.

Auteur de quelques essais tels La littérature contre elle-même (1985) et La génération lyrique (1992), M. Ricard a marqué le monde littéraire avec sa biographie Gabrielle Roy – Une vie, sortie en 1996. L’ouvrage avait été écrit à la demande de l’autrice d’origine manitobaine morte en 1983.

« À la tête du Fonds Gabrielle-Roy, il a joué un rôle très important dans la préservation et la diffusion de l’œuvre de la grande romancière. Il avait été choisi par Milan Kundera pour réaliser les préfaces des rééditions de l’ensemble de ses œuvres, y compris dans la prestigieuse collection de La Pléiade », lit-on dans le communiqué du Boréal.

Au sujet de Kundera, Jacques Godbout se souvient des circonstances qui ont conduit Ricard à se plonger dans l’œuvre de l’écrivain tchèque au début des années 1970. « Kundera est passé par Montréal avant de s’installer en France. Nous l’avions reçu à une rencontre d’écrivains, dit-il. François a alors rédigé un texte sur lui et a essayé de l’inviter comme professeur à McGill. Mais Kundera avait déjà des ententes à Paris. Ils sont restés en relation. »

Au Boréal, François Ricard a accompagné de nombreux écrivains dans leur travail, dont Fernand Dumont, Serge Bouchard, Gilles Archambault, André Major, Jacques Brault et Pierre Nepveu.

« Il était aussi l’éditeur de plus jeunes écrivains comme Dominique Fortier, Isabelle Daunais, Nadine Bismuth. Il faisait un pont culturel entre les générations », dit Pascal Assathiany.

D’un point de vue strictement personnel, MM. Assathiany et Godbout perdent un ami. « François était discret, amusé, amusant et humoristique, dit Jacques Godbout, qui avait connu M. Ricard à la revue Liberté. Il n’acceptait pas la bêtise. Et il était un très bon golfeur. »

François Ricard a reçu de nombreuses distinctions au cours de sa carrière. Il a remporté deux Prix du Gouverneur général, en 1985 et en 2003, et le prix Athanase-David en 2018.

Il a poussé son dernier souffle à Montréal à la suite d’une longue maladie.