C’est la dramaturge, romancière et traductrice Fanny Britt qui remporte le Prix littéraire du Gouverneur général, décerné par le Conseil des arts du Canada, pour Faire les sucres, dans la catégorie Romans et nouvelles.

Fanny Britt nous a confié au bout du fil sa surprise et son incrédulité lorsqu’elle a appris la nouvelle. « Déjà, la nomination m’avait ravie. Je me disais : c’est tout ce dont j’avais besoin ; juste cette tape dans le dos était vraiment formidable à recevoir. Donc, gagner, c’est quasiment trop ! »

Publié en octobre 2020 au Cheval d’août, Faire les sucres est le deuxième roman de Fanny Britt, après Les maisons, qui s’ajoute aux nombreuses pièces de théâtre, livres jeunesse et essais qu’elle a signés. Il explore la question des privilèges, du confort et du bonheur à travers l’histoire d’un couple, Adam et Marion, d’une jeune fille — Celia — qui vit à Martha’s Vineyard, au Massachusetts, d’une famille propriétaire d’une érablière à Oka et d’un chef de chorale anglophone à Hudson.

« [En remportant ce prix], je me suis sentie libérée de ma propre ambition. Je me sens très outsider au milieu du roman […], comme si je n’avais pas vraiment ma place là, parce que je me sens vraiment plus comme une personne de théâtre. »

Dans toute la subjectivité [de l’attribution des prix] et tout en sachant à quel point c’est fragile, malgré tout, c’est comme si ce prix-là me donnait la permission non seulement de continuer, mais surtout d’être libre : je ne serai plus poursuivie par l’idée d’écrire pour être reconnue.

Fanny Britt

« Avec un prix comme ça, c’est littéralement du temps qui nous est donné pour écrire et pour s’enlever des inquiétudes du quotidien », estime Fanny Britt, alors que l’idée d’un troisième roman a déjà germé dans son esprit. « Je n’ai pas commencé à écrire parce que je suis prise dans d’autres projets de théâtre et de traduction, entre autres, mais depuis plusieurs mois, il y a comme des notes qui se prennent et je me surprends à y penser souvent », dit-elle.

Les autres finalistes dans la catégorie Romans et nouvelles étaient J’ai montré toutes mes pattes blanches je n’en ai plus, de Sylvie Laliberté, Noir métal, de Sébastien Chabot, Rien du tout, d’Olivia Tapiero, et Tout est ori, de Paul Serge Forest.

Un prix posthume pour Serge Bouchard

Dans la catégorie Essai, c’est le titre Du diesel dans les veines, de Serge Bouchard et Mark Fortier, qui a été choisi. Paru chez Lux en avril, le livre est une version remaniée, avec l’apport de l’éditeur Mark Fortier, de la thèse de doctorat de l’anthropologue, auteur et homme de radio Serge Bouchard, qui s’est éteint le 11 mai dernier.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Serge Bouchard (sur la photo) a remporté avec Mark Fortier le Prix du Gouverneur général pour Du diesel dans les veines.

« C’était son premier livre qui va avoir été son dernier en même temps ; c’est comme une boucle qui s’est bouclée. Dans la seule entrevue qu’on a accordée ensemble, parce qu’il a été hospitalisé assez rapidement après la sortie du livre, il a dit que si on voulait comprendre son œuvre littéraire, il y avait deux livres à lire : Le moineau domestique, qui est son premier [et vient tout juste d’être réédité en Boréal Compact], et Du diesel dans les veines », a souligné Mark Fortier, pour qui l’absence de Serge Bouchard apparaît « immense » depuis l’annonce du prix.

L’anthropologue se penche dans Du diesel dans les veines sur le mode de vie des camionneurs dans le nord du Québec.

Avec sa façon de magnifier des personnages qui sont oubliés dans la société ou dans l’histoire […], c’est un livre qui porte sur beaucoup plus que les camionneurs ; c’est une vision de la culture, de la liberté des personnes et des groupes humains qui transparaît dans le regard que Serge porte sur le monde des camions.

Mark Fortier, éditeur

La reconstruction du paradis, de Robert Lalonde, La vie au long cours, d’Isabelle Daunais, L’empire invisible, de Mathieu Bélisle, et Occuper les distances, d’Esther Laforce, étaient également finalistes dans la catégorie Essai.

Des prix dans sept catégories

En tout, 14 titres ont été choisis en français et en anglais pour chacune des 7 catégories parmi les quelque 70 finalistes de 2021.

En poésie et en théâtre, les lauréats sont respectivement Pendant que Perceval tombait, de Tania Langlais (Les Herbes rouges), et Copeaux, de Mishka Lavigne (L’Interligne).

En littérature jeunesse, dans la catégorie texte, le gagnant est Jean-François Sénéchal pour Les avenues, paru chez Leméac, tandis que du côté des livres illustrés, il s’agit d’À qui appartiennent les nuages ?, de Mario Brassard et Gérard DuBois (La Pastèque).

Et enfin, dans la catégorie Traduction, c’est la version française des poèmes d’Elizabeth Smart — Poèmes 1938-1984 —, écrite par Marie Frankland et parue aux Éditions du Noroît, qui s’est démarquée.

Les gagnants des Prix littéraires du Gouverneur général se voient décerner une somme de 25 000 $ pour leur livre, alors que l’éditeur reçoit de son côté 3000 $ pour en faire la promotion.

Le dévoilement des lauréats de 2020 ayant dû être reporté au 1er juin dernier en raison de la pandémie, il s’agit de la deuxième annonce cette année des gagnants des Prix du Gouverneur général, qui reprendront leur rythme habituel l’an prochain.

Consultez le site des Prix littéraires du Gouverneur général