On pourrait trouver que les romans de Christine Eddie sont saturés de bons sentiments et les juger un peu cucul.

Pourtant, il y a un ton chez l’autrice des Carnets de Douglas, un humour teinté d’ironie, et surtout une affection pour les personnages légèrement désespérés, qui finissent par vaincre toutes les résistances. C’est le cas particulièrement pour Un beau désastre, joli récit d’apprentissage qui suit les traces de M.-J., ado pas comme les autres qui voit la vie en noir jusqu’au jour où lui-même commence à mettre de la couleur dans son quartier populaire tout gris. Dans le Vieux-Faubourg, M.-J. et sa tante Célia sont entourés d’une foule de gens « ordinaires » auxquels Christine Eddie, qui sait dépeindre avec autant de justesse que d’empathie une situation, une relation ou un sentiment, donne une touche d’extraordinaire.

L’autrice arrive toujours le doigt sur la faille, la beauté, le moment de leur histoire où tout a basculé pour le meilleur ou pour le pire. Résultat : ce qui au départ peut sembler une histoire pas mal tirée par les cheveux devient une belle allégorie sur la force de l’art, la puissance de la solidarité et l’amour capable de tout. Ce très beau roman sorti en février, juste avant la pandémie, est certainement un antidote à la morosité et à l’incertitude ambiantes, comme M.-J. l’aura lui-même été pour le monde autour de lui.

Un beau désastre, Christine Eddie, Alto, 186 pages, Trois étoiles et demie