Coyotes et Alligators, récit palpitant à l’ambiance anxiogène, où l’avenir semble aussi gris que l’air de la ville, est le deuxième roman de François Leblanc, après Le fruit de mon imagination.

Il y met en scène un narrateur de 12 ans, évoluant quelque part dans un avenir assez lugubre qu’on imagine pas très lointain, dans une ville inconnue qui semble laissée à elle-même, avec ses rues sales, ses pannes d’électricité, sa chaleur étouffante et ses quartiers et animaux dangereux, où l’espoir de jours meilleurs s’amenuise comme peau de chagrin. Lucide et désillusionné, adulte dans un corps d’enfant pratiquant l’art du stoïcisme, l’adolescent vit avec son père, un personnage brusque et désagréable qu’il déteste, dans un appartement sans lustre, enjolivant les souvenirs d’une mère enfermée dans un hôpital psychiatrique, rêvant d’une issue heureuse à son malheur. Même son « camp de vacances », un camp de survie où une bande de voyous fait la loi, est déprimant à l’extrême.

Tout bascule lorsqu’il y fait la rencontre de Sebastian, un garçon de 10 ans à la beauté délicate, qu’il sauve, tant bien que mal, de l’humiliation que veulent lui faire subir les intimidateurs en chef du camp. Devenant son « protecteur », le narrateur, qui n’a pourtant pas du tout la tête de l’emploi, deviendra fasciné par celui qui, contrairement à lui, semble avoir une famille et une vie parfaite. Ensemble, ils tenteront le tout pour le tout afin d’échapper à leur destin. Explorateurs en herbe dans une ville laissée à elle-même, comme eux, ils feront l’apprentissage à la dure que la vraie force n’est pas toujours là où on croit la trouver, et que de la peur peut naître la résilience.

Ce roman d’apprentissage qui prend des airs de dystopie est prenant, et se lit d’une traite. Le point de vue de l’enfant permet de donner aux choses et aux personnages un tout autre contour que s’il était raconté par un adulte, ce qui donne sa force au récit. L’auteur laisse volontairement le flou sur les raisons qui ont fait basculer cette ville dans un univers presque sans foi ni loi. On aurait quand même aimé qu’il développe un peu plus cet aspect.