À sa 37e année, Le Printemps de Bourges n'est pas seulement le doyen des festivals musicaux en France. Il est celui qui lance véritablement la saison des festivals et où accourent les professionnels de la musique de la France, mais aussi, de plus en plus, de l'Europe. Et du Québec.

«Quand Le Printemps de Bourges marche, c'est toujours de bon augure pour le restant de l'année des festivals en France», lance Christophe Davy, dit Doudou, directeur artistique de ce festival établi dans une petite ville du milieu de la France qui s'ouvre aujourd'hui pour se terminer dimanche.

Le Printemps de Bourges est né en 1977 alors même que le punk secouait l'Angleterre. «La version punk en France, c'était Renaud, c'était la chanson contestatrice qui, par la suite, est rentrée dans le rang et est devenue grand public, rappelle Christophe Davy. À l'époque, on n'avait que de la variété très grand public en France et le Printemps s'est créé avec des gens comme Guy Bedos, Renaud et Francis Lalanne pour devenir un événement qui n'existait pas à l'époque en matière de festival.»

Daniel Colling, l'un des fondateurs du Printemps, voulait créer un événement regroupant des artistes plus en marge qui n'accédaient pas aux radios nationales, encore moins aux télés. Plusieurs sont devenus des artistes à succès et Bourges a accueilli son lot de superstars, de France évidemment, mais aussi d'ailleurs comme U2 qui y a joué en 1983 alors que son album War enflammait la planète. Menacé de faillite ou de déménagement, le Printemps a maintes fois corrigé le tir et trouvé son équilibre entre la musique dite commerciale et la quête de nouveaux artistes qui ont des choses à dire.

Bien sûr, les Public Enemy, Patti Smith et Benjamin Biolay qui s'y produisent cette année n'ont plus besoin de présentation, mais nombre d'artistes émergents viennent profiter de la visibilité que leur assure Bourges, et l'off-Bourges des bars de la petite ville, dans l'espoir de se faire remarquer des tourneurs et des producteurs qui y affluent.

Laurent Saulnier, des FrancoFolies de Montréal, y vient depuis des années. Sa programmation 2013 est évidemment déjà ficelée, mais il pense à l'an prochain tout en en profitant pour voir un groupe français déjà invité à Montréal, Granville, qui lui est tombé dans l'oreille, mais qu'il n'a pas encore vu à l'oeuvre.

«Mais il y a un groupe en particulier que je vais voir à Bourges et que je vais peut-être inviter dès cet été sur une scène extérieure, confie Saulnier. On a gardé une case au cas où et si c'est bon... Ce qui est bien à Bourges, et encore plus cette année, c'est son éclectisme et c'est ce qui nous rapproche aussi. La grande différence, c'est que chez eux, ça se passe en toutes sortes de langues alors que nous, on s'en tient vraiment au français. Mais il y a aussi des artistes comme Woodkid et Dom La Nena qui vont jouer au Festival de jazz. Je mets mes deux chapeaux.»

En France, l'expression consacrée pour cette mixité de musiques (rock, pop, chanson, hip-hop, musiques du monde, et même classique et jazz) est musiques actuelles. «Musiques actuelles, ça veut aussi dire qu'on peut aussi bien faire de nouveaux artistes comme des artistes anciens qui ont une actualité», explique Christophe Davy.

Cette année, exceptionnellement, Bourges a invité une douzaine d'artistes de chez nous - le grand laboratoire américain bilingue, dit le programme -, dont certains se produiront dans deux spectacles étiquetés Montréal: l'un, franco, mettant en vedette Ariane Moffatt, Marie-Pierre Arthur et Salomé Leclerc, et l'autre, anglo, avec Half Moon Run, Mac DeMarco, Plants and Animals et le cousin des Maritimes, Rich Aucoin. Karim Ouellet, Melissa Laveaux, A-Trak et Zeds Dead seront aussi de la partie.

«On ne s'est pas dit, à la base, tiens, cette année, on va faire forcément Montréal, mais on avait les groupes qui allaient avec, précise Christophe Davy. Ariane, ça faisait longtemps qu'on voulait absolument la faire, puis Marie-Pierre Arthur a sorti un disque ici sur Polydor. On s'est dit: c'est marrant, on pourrait faire un truc Montréal. Half Moon Run est arrivé assez vite sur le tapis et l'idée est venue en tirant un peu le fil.»

On s'en reparle toute la semaine.