Quel projet fera vibrer les murs du Vieux Palais d’Amos, l’un des bâtiments que le gouvernement du Québec avait choisis pour y installer l’un de ses Espaces bleus, avant d’abandonner l’idée ? Déménagement de la bibliothèque municipale, déplacement de l’hôtel de ville, création d’un théâtre de poche ? Tout est envisagé, mais pas à n’importe quel prix, assure le maire Sébastien D’Astous.

La population a appris le 4 mars dernier que les Espaces bleus ne verraient pas le jour, mais le maire d’Amos en a été informé plus tôt, avant de s’envoler pour les Philippines afin de participer à Survivor Québec. « On a trouvé ça pas mal triste », répond-il dans son bureau amossois.

Sébastien D’Astous croyait à l’idée de revitaliser l’édifice historique pour en faire un lieu culturel qui aurait profité à l’ensemble de la région et dont les expositions auraient été gérées par le Musée de la civilisation de Québec. « On n’a pas les ressources à Amos pour faire un équivalent. C’était facilitant de savoir que le gouvernement s’en chargerait au sein d’un projet grandiose. En plus, ça ramenait des taxes. »

Quand on lui demande si la Ville a vendu le Vieux Palais au gouvernement à prix d’ami dans l’espoir de profiter des retombées de ce projet culturel et touristique, il nuance la situation. « Le bâtiment a une grande valeur patrimoniale, mais comme il y avait des millions à investir dedans, personne ne l’aurait acheté. Ça ne vaut rien d’un point de vue immobilier. »

En date du 29 février 2024, le ministère de la Culture et des Communications avait dépensé 3,7 millions de dollars dans le projet d’Espace bleu à Amos. Pour acquérir les lieux, mais surtout pour commencer les travaux – démolition intérieure pour voir l’étendue des problèmes structuraux du bâtiment – et pour un appel d’offres de plans et devis qui ont été faits.

De nombreux organismes ont dû quitter les lieux afin que les travaux soient réalisés. Ils ont été déplacés dans un local loué par la Ville d’Amos.

Un édifice laissé à lui-même

Le gouvernement savait-il qu’il abandonnerait les 17 Espaces bleus avant d’entreprendre les travaux à Amos ? Le maire répond que la démolition a commencé il y a plus de 18 mois et qu’il n’a été avisé que récemment de la fin du projet.

C’est en ouvrant le bâtiment pour comprendre ses problématiques et en faisant l’appel d’offres que le gouvernement s’est rendu compte de l’ampleur du projet. Quand on fait ça dans des bâtiments patrimoniaux, ça coûte une fortune !

Sébastien D’Astous, maire d’Amos

Depuis l’interruption des travaux, le Vieux Palais est laissé à lui-même : les murs, les planchers et les plafonds sont à découvert, et l’imposant escalier de bois est recouvert de planches. Même sans activité, sa seule existence coûte de l’argent aux contribuables. « Les frais de gestion et d’entretien du Vieux Palais ont été estimés à 116 395 $ annuellement », explique Amelia Benattia, attachée de presse au cabinet du ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe.

Un édifice laissé à lui-même
  • Le Vieux Palais d’Amos a fait l’objet d’une démolition intérieure pour voir l’étendue des problèmes structuraux du bâtiment.

    PHOTO FOURNIE PAR LA VILLE D’AMOS

    Le Vieux Palais d’Amos a fait l’objet d’une démolition intérieure pour voir l’étendue des problèmes structuraux du bâtiment.

  • Les murs, les planchers et les plafonds sont à découvert depuis que les travaux ont été interrompus.

    PHOTO FOURNIE PAR LA VILLE D’AMOS

    Les murs, les planchers et les plafonds sont à découvert depuis que les travaux ont été interrompus.

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Beaucoup d’Amossois souhaitent que le Vieux Palais ait une nouvelle vie, mais l’avenir du bâtiment – qui appartient toujours au Musée de la civilisation – suppose d’importants coûts. D’abord pour refaire l’intérieur, mais aussi pour répondre aux normes (création de sorties de secours, installation d’un ascenseur, entrée permettant l’accessibilité universelle).

La Ville n’a pas la volonté de récupérer le bâtiment dans cet état. On est en discussions avec le musée et le gouvernement pour avoir un bâtiment qui répond aux normes et qui est gérable pour la Ville – et potentiellement un budget d’exploitation au cours des prochaines années.

Sébastien D’Astous, maire d’Amos

La culture avant tout ?

Dans une ville qui a la réputation d’investir énormément en culture (6,1 % de son budget d’un peu plus de 50 millions), la future vocation culturelle au Vieux Palais semble inévitable.

Toutefois, le maire n’écarte aucune option. « La communauté culturelle souhaite un théâtre de poche [en complément du Théâtre des Eskers], mais est-ce qu’une ville de 14 000 habitants peut se le permettre ? »

Sébastien D’Astous évoque aussi l’idée d’y déménager l’hôtel de ville ou la bibliothèque municipale, même si celle-ci – qui fête cette année son 30e anniversaire au sein de la maison de la culture – répond aux besoins de la municipalité. « Je n’ai aucun intérêt à la déménager à la base. Mais comme elle se trouve dans un bâtiment aux normes, qui serait plus facile à vendre et à convertir par un [acquéreur] privé qui voudrait en faire autre chose, on pourrait peut-être déplacer la bibliothèque dans le Vieux Palais et en faire un lieu très coquet. Cela dit, ce n’est pas ma volonté. »

Sa priorité : que le bâtiment soit entretenu et utilisé… sans que ça coûte plus cher à la Ville. « Nos taxes sont déjà assez élevées », dit-il avec conviction.

La porte-parole du ministre de la Culture et des Communications avance que la réflexion progresse. « La décision de réorienter le projet des Espaces bleus étant récente, les démarches avec les différents partenaires de la région sont en cours », affirme Amelia Benattia dans un échange par courriel.

« Les discussions vont bon train, confirme le maire. J’ai eu deux appels à ce sujet lundi dernier et je m’attends à avoir des réponses dans les prochaines semaines. »