L'année 2010 marque le 50e anniversaire du début officiel de ce qu'un journaliste anglophone appellera plus tard la quiet revolution. Révolution tranquille (jusqu'en 1968...) qui avait commencé bien avant, il faut le dire, l'élection du Parti libéral de Jean Lesage, le 22 juin 1960.

Parmi les écrits qui se sont avérés les «accélérateurs» de cette époque de changement, Les insolences du frère Untel, lancé aux éditions de l'Homme en septembre 1960, compte parmi les plus importants.

«C'est un livre de civilisation», lance le journaliste et auteur Luc Dupont qui prépare une biographie du célèbre frère Untel, Jean-Paul Desbiens de son vrai nom (1927-2006). «Cet ouvrage allait beaucoup plus loin que de dénoncer le joual: Les insolences du frère Untel ont été un déclencheur de la Révolution tranquille.» «Une langue désossée parlée par une race servile», disait le bouillant frère Pierre-Jérôme, du nom que le jeune Desbiens avait pris en entrant chez les frères maristes en 1944.

Pour souligner l'anniversaire, le Salon du livre a confié à Luc Dupont la conception d'une animation autour du frère Untel. Portant la soutane et la bavette des frères maristes, le comédien Xavier Vézina lira des extraits des lettres que le «frère Un Tel» avait fait paraître dans Le Devoir au cours des mois précédents et qui ont constitué le gros des Insolences. Les Presses de l'Université Laval (PUL) viennent d'ailleurs de lancer l'intégralité de ces documents sous le titre De quoi ont-ils peur?.

Si les impacts politiques des Insolences sont connus - l'ouvrage a contribué à la réflexion menant à l'institution du ministère de l'Éducation -, son influence sur les individus l'est moins. Ainsi Luc Dupont a-t-il invité l'essayiste et romancier André Major, un «témoin» - il avait alors 17 ans - qui avait trouvé dans cet ouvrage «le pendant de sa propre révolte intérieure». Dans le journal étudiant du collège des Eudistes, le futur cofondateur de la revue Parti pris (1963-1968) avait signé une critique favorable aux Insolences, position qui lui vaudra d'être renvoyé de la jeune institution rosemontoise.

Le «petit livre à une piastre» des éditions de l'Homme a changé bien des vies.

Lecture publique et table ronde sur les 50 ans des Insolences du frère Untel vendredi, 20h15, à l'Agora Van Houtte.