Ils ont bien vieilli, Guy et Sylvie. Ils demeurent décalés, mais pas dépassés. Ils réagissent sans être réactionnaires. Et à 60 ans, ils forment un couple moderne et amoureux, une rareté à la télé québécoise de nos jours.

C’est un pur bonheur que de les retrouver dans les nouveaux épisodes d’Un gars, une fille, version 2023. C’est drôle, rythmé, actuel et punché. Oui, la magie opère encore, 20 ans après la diffusion du dernier épisode de cette comédie, en mars 2003.

Les détails techniques, avant de poursuivre. Le premier des quatre épisodes de la sitcom arrive ce jeudi sur l’Extra de Tou.tv, qui en relaiera un par semaine jusqu’au 30 mars. Puis, à partir du lundi 24 avril, Un gars, une fille se vissera dans la case horaire de STAT pour une semaine complète de Guy, Sylvie et leurs deux enfants d’âge adulte. Cotes d’écoute gigantesques à prévoir.

Les nombreux fans d’Un gars, une fille qui connaissent tous les sketchs par cœur retrouveront l’esprit original et tous les codes de cette histoire à la fois simple et hyper efficace. Oui, la musique (actualisée) ponctue chacune des scènes tournées en plan-séquence, il y a des scratchs visuels et sonores pour marquer des coupures dans le récit et tous les acteurs de la distribution reviennent y faire un coucou.

Guy et Sylvie, campés par Guy A. Lepage et Sylvie Léonard, coulent maintenant des jours paisibles dans une banlieue chic de style Saint-Lambert, qu’ils habitent depuis 20 ans. Leur fille Camille (Anyjeanne Savaria), adoptée au Viêtnam dans le dernier épisode de la série originale, étudie à Sherbrooke. Leur fils Charles (Jean-Christophe Leblanc), dont la conception miraculeuse a été révélée à la fin de la septième saison, travaille dans l’industrie du jeu vidéo. C’est tout ce qu’il est permis de dévoiler sans divulgâcher l’intrigue.

Le premier épisode nous fait (re)craquer pour ce couple bien assorti qui songe à vendre son bungalow pour racheter un condo sur le Plateau. Bien sûr, Sylvie reste naïve, bavarde et expressive, mais pas cruche ni nounoune. Pétrie de contradictions, vous comprendrez en visionnant le sketch sur les cheveux gris, cette femme dynamique se tient au courant du monde qui l’entoure. Par exemple, Sylvie ne sait pas comment utiliser Google Maps, mais reconnaît immédiatement des stéréotypes sociaux sexospécifiques.

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Scène de la nouvelle série Un gars, une fille

Sylvie oublie de désactiver la fonction sourdine sur Zoom (alerte boomer !), mais ne jure que par son Apple Watch. Et ce que devient Sylvie professionnellement, après avoir vendu le magazine qui porte son nom ? Le deuxième épisode le révèle et ça clouera le bec aux détracteurs qui trouvent Sylvie trop aérienne.

On ne sait toujours pas ce que Guy fabrique dans la vie. Il accepte encore des contrats de consultation, sans préciser dans quel domaine. Légèrement mononcle dans ses réactions, le personnage de Guy n’est pas devenu psychorigide ou borné. Même qu’il est pas mal plus progressiste qu’à sa création.

La souplesse de Guy et Sylvie passe beaucoup par le personnage de leur grande fille Camille, une militante LGBTQ+ à l’orientation sexuelle fluide. Camille fréquente Mo (Camille Léonard), une personne non binaire qui utilise le pronom iel.

IMAGE TIRÉE DE LA BANDE-ANNONCE

Guy et Sylvie dans une scène avec leur fille Camille (Anyjeanne Savaria)

Évidemment que les parents de 60 ans posent un paquet de questions à leur fille sur les « dick pics » et sur le verbe « mégenrer ». Mais Guy et Sylvie n’ont pas l’air écrasés par la réalité des jeunes d’aujourd’hui. Ils ne se braquent pas devant ces concepts très 2023, parfois déstabilisants, même s’ils n’en saisissent pas toutes les nuances. L’important, c’est de s’informer.

Et quand l’un l’échappe, l’autre le remet à sa place. Heille, on n’est plus en 1997, allô !

Guy et Sylvie montrent qu’à 60 ans, on n’est pas destiné à la voie de garage ou au cimetière. Leur vie sexuelle se porte bien (merci, Viagra). Leur complicité n’a pas flétri et ils nourrissent plein de projets. On sent qu’ils s’aiment, se respectent et s’admirent, tout en se taquinant. Le picossage affectueux reste leur marque de commerce, quand même.

Le père de Guy (Pierre Lebeau), son ex-belle-mère Mélanie (Mahée Paiement) et sa sœur lesbienne Élise (Élise Guilbault) apparaissent tous dans la première demi-heure. Vous aurez également des nouvelles étonnantes d’Anakin, le demi-frère de Guy.

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Guy A. Lepage, Élise Guilbault et Sylvie Léonard dans une scène d’Un gars, une fille

Toujours branché sur les dernières tendances, le couple Loulou et Daniel, interprétés par Louise Richer et Daniel Brière, revient en force au deuxième épisode. Caroline Néron se glisse dans les vêtements griffés d’une intense agente immobilière que l’on pourrait facilement retrouver dans la docusérie Numéros 1 de Casa.

Pour le moment, Radio-Canada ne prévoit pas réintégrer Un gars, une fille de façon permanente dans sa grille. « Si le public aime ça, on s’en reparlera », glisse Guy A. Lepage, qui signe les textes et coréalise les nouveaux épisodes avec Jean-François Fontaine.

Je regardais mercredi la nouvelle cuvée d’Un gars, une fille et je me disais : a) maudit que Sylvie Léonard est bonne, c’est hallucinant, et b) j’espère que le remake de La petite vie sera aussi réussi, si l’on veut s’éviter un psychodrame collectif, seigneur.