Zone rouge ou pas, les 33 salles du Quartier des spectacles de Montréal pressent le gouvernement de les autoriser à rouvrir leurs portes au public. Le temps presse pour préserver « la plus forte concentration de lieux culturels en Amérique du Nord ».

« Nous ne sommes pas juste de la culture, mais de l’économie », lance Monique Simard, présidente du conseil d’administration du Partenariat du Quartier des spectacles.

Mercredi dernier, Lorraine Pintal, directrice artistique et générale du Théâtre du Nouveau Monde (TNM), et elle ont fait parvenir une lettre en ce sens au premier ministre François Legault et à la ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy (lettre qui est publiée ce samedi dans notre section Débats).

Plus tard dans la journée de mercredi, le gouvernement a annoncé que tout le Québec passait en zone orange après la semaine de relâche, sauf le Grand Montréal, mais aussi les régions de Laval, la Montérégie, les Laurentides et Lanaudière.

La patience du milieu des arts vivants montréalais est donc encore mise à rude épreuve. « On nous a dit de nous tenir prêts », indique néanmoins Lorraine Pintal, qui préside le comité des salles de spectacles du Quartier des spectacles.

Jeudi matin, Monique Simard et elle ont participé à une rencontre avec la ministre Nathalie Roy. Si elles sentent « de la bonne volonté » et de l’écoute de la part du gouvernement, elles s’inquiètent grandement pour le centre-ville de Montréal.

La vitalité culturelle et économique du centre-ville est tributaire de l’ouverture de nos salles.

Lorraine Pintal

Dans leur lettre, la directrice du TNM et Monique Simard rappellent que les 33 salles du Quartier des spectacles – dont 7 indépendantes – ont des réalités différentes. Des salles privées comme le MTelus ou le Club Soda ne se gèrent pas comme la Place des Arts (financée par l’État), le Gesù, la salle Pierre-Mercure, l’Agora de la danse ou un repaire plus underground comme le Théâtre Sainte-Catherine. Mais chaque lieu a son rôle et sa place. « C’est un écosystème », illustre Lorraine Pintal.

Bon an, mal an, près de 30 % de tous les billets de spectacles vendus au Québec le sont dans le Quartier des spectacles, selon l’Observatoire de la culture et des communications du Québec. En 2018, les 33 salles ont accueilli quelque 1,7 million de spectateurs et ont généré 80 millions de dollars de recettes de billetterie. Ce sont également des milliers d’emplois et des retombées de millions de dollars pour les boutiques, restaurants, bars et hôtels voisins.

En lieu sûr

Pour Lorraine Pintal, il est « incohérent » que les salles de spectacles demeurent fermées en zone rouge alors qu’elles sont aussi sûres que les musées et les cinémas.

Au cours de la dernière année, les gestionnaires de salles se sont dotés de procédures et de mesures sanitaires qui respectent les exigences de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

Dans un sondage Léger commandé en novembre dernier par le Partenariat du Quartier des spectacles, 71 % des habitués se sont dits prêts à assister à un spectacle en salle dès la levée des mesures de confinement.

« Le lien et la relation de confiance avec le public sont très importants », souligne Monique Simard. Lors de sa rencontre avec la ministre Roy, on lui a par ailleurs assuré qu’une campagne promotionnelle pour rétablir la confiance des spectateurs dans un contexte de déconfinement était dans les plans.

Si les salles rouvrent, le comité des salles de spectacles du Quartier des spectacles demande aussi un assouplissement du couvre-feu (à 21 h 30). Il espère en outre que les programmes d’aide financière seront reconduits, surtout avec les capacités réduites des salles vu la distanciation physique. « On ne peut pas demander aux gens de payer plus cher », dit Lorraine Pintal.

Chose certaine, les salles veulent rouvrir pour de bon.

Tout un mandat

Les Montréalais ont soif de culture, observe Monique Simard, qui va au cinéma presque tous les jours.

Cela ne faisait que six mois que l’ancienne présidente de la SODEC présidait le conseil d’administration du Partenariat du Quartier des spectacles (en remplacement de Jacques Primeau) quand la pandémie s’est déclarée. Dans les cinq mois qui ont suivi, elle a même remplacé le directeur général Pierre Fortin, qui a quitté ses fonctions (aujourd’hui occupées par Éric Lefebvre).

« Cela a été toute une courbe d’apprentissage, relate-t-elle. Je suis une bien meilleure présidente de conseil d’administration ! » Elle se réjouit d’une chose : « Les partenaires du Quartier des spectacles sont plus unis et solidaires que jamais. »

Ailleurs dans le monde

À New York, le gouverneur Andrew Cuomo a autorisé la réouverture de certaines salles avec une capacité maximale de 33 % jusqu’à concurrence de 100 personnes. En Europe, des spectacles-pilotes sont donnés où on teste des protocoles sanitaires.

Lisez un article sur la réouverture des salles à New York