Ils sont chacun à la barre d’une émission à la radio pour la première fois de leur carrière. En plus de faire partie d’une nouvelle génération d’animateurs – les 30 à 40 ans – qui prend sa place dans les médias. La Presse a réuni Alec Castonguay, Philippe-Vincent Foisy et Monic Néron pour parler de la radio et de son importance dans les médias.

Une génération toujours fidèle à la radio

Monic Néron : « J’ai commencé à faire de la radio à 15 ans, dans la région de Charlevoix. On me disait alors que si je voulais faire carrière en communications, j’aurais mieux fait de choisir un autre média… On a souvent prédit la mort de la radio, et ça n’arrive pas. Pourquoi ? Selon moi, la raison se trouve dans la pertinence, l’authenticité et l’efficacité du média. Tu ouvres le micro, et c’est parti ! Si tu mens à la radio, ta voix va te trahir. C’est un média de vérité. »

Alec Castonguay : « Je viens de la presse écrite. Or, si j’avais eu à choisir un deuxième média à 20 ans, ça aurait été la radio. J’aime la télé, mais l’apparence compte pour beaucoup et complique les choses. Jean Lapierre me disait : "Si tu mets une cravate d’une couleur trop voyante, les gens regardent juste ta cravate ; ils n’écoutent plus ce que tu dis." J’aime la souplesse de la radio. Le fait de pouvoir changer de sujet rapidement, parfois cinq minutes avant d’entrer en ondes. La radio combine l’agilité et la rapidité. »

Philippe-Vincent Foisy : « Mes premiers souvenirs de radio remontent lorsque mon père me conduisait à l’école le matin. Dans la voiture, on écoutait un peu de tout : René Homier-Roy, François Pérusse, Les Grandes Gueules, Terry DiMonte. La radio a toujours fait partie de ma vie. Avant d’avoir à me lever au milieu de la nuit pour le travail, elle faisait partie de ma routine du matin. Je me brossais les dents et je prenais ma douche en écoutant la radio ! C’est vraiment un média d’accompagnement. Aujourd’hui, la balado a apporté une nouvelle exploration de l’audio. Ma génération s’informe davantage sur le web. Or, la technologie numérique permet de rejoindre ces jeunes qui n’écoutent pas la radio traditionnelle. Plus besoin de nous écouter en direct. »

L’actualité vue à la radio

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Dès le 4 septembre, Monic Néron animera Le genre humain, un nouveau rendez-vous hebdomadaire sur ICI Première, diffusé le samedi à 16 h.

Monic Néron : « Il n’y a rien comme la radio pour rebondir sur l’actualité. Peu importe les crises, les guerres, la radio a toujours été au cœur des bouleversements sociaux. Et la pandémie actuelle ne fait pas exception. Je vais animer une nouvelle émission, mais je ne resterai pas enfermée dans mon studio. Chaque semaine, on va débuter avec un reportage sur le terrain. On va aller à la rencontre des citoyens dans leur environnement. Ces reportages seront réalisés sous forme de podcasts avec Mathieu Waddell, un réalisateur chez Rad [une plateforme de journalisme d’enjeux de société sur le web de la société d’État]. »

Philippe-Vincent Foisy : « Depuis mes débuts dans le métier, j’ai surtout couvert la politique. J’ai été correspondant parlementaire à Ottawa. Comme Alec [Castonguay] à Midi Info, j’ai commencé mon émission au lendemain du déclenchement des élections fédérales. Je suis donc dans mon élément. Moi aussi, je ne fais pas le deuil du terrain. Je fais des interventions à LCN. Je ne me sens pas enfermé dans un studio. Si je veux sortir dans la rue et faire une balado durant la journée, je peux le faire. »

Alec Castonguay : « Il y a bien sûr une nervosité à débuter comme animateur, même si j’ai fait 13 ans de chroniques à la radio avant d’animer. Le plus stressant, ce ne sont pas les entrevues, mais la gestion du temps qui file rapidement en ondes ; chaque seconde d’une entrevue de sept minutes compte. Toutefois, je suis chanceux de commencer cet été, car les sujets me favorisent. Des campagnes électorales, j’en couvre depuis des années. L’Afghanistan, j’y suis allé trois fois en reportage. L’actualité a mis un baume sur ma nervosité. En même temps, je suis conscient que l’animation va me permettre d’élargir ma palette de sujets. »

Le défi de l’animation

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À 32 ans, Philippe-Vincent Foisy est le jeune et nouveau morning man de QUB radio, en semaine, de 6 h à 8 h. Son émission peut être écoutée en direct ou en balado par la suite.

Philippe-Vincent Foisy : « Comme morning man, le plus dur, c’est de me lever à 3 h 30… avec une petite fille de 10 mois qui ne fait pas encore ses nuits. De plus, j’arrive très préparé en studio avant d’entrer en ondes, car je parle de l’actualité avec des chroniqueurs comme Mario Dumont et Benoit Dutrizac. De vrais professionnels qui lisent tout, connaissent tout et travaillent très fort. C’est pour ça qu’ils sont là depuis longtemps. Mais j’adore ça être dans l’action tôt le matin ! J’ai l’impression d’être en avance de deux ou trois heures sur le reste du monde. »

Monic Néron : « J’ai fait pas mal de radio à Cogeco, dont six ans avec Paul Arcand le matin au 98,5 FM. Paul est mon mentor. Lorsque j’ai quitté l’émission avant d’avoir mon garçon, c’est lui qui m’a dit que j’étais mûre pour l’animation. Il a atténué mes doutes. C’est bien que La Presse s’intéresse à notre génération à la radio. C’est inévitable qu’on souhaite aborder des sujets qui nous préoccupent au quotidien. Nous sommes tous les trois de jeunes parents… »

Alec Castonguay : « J’ai deux filles de 6 et 2 ans. Comme mes collègues, je vais m’intéresser par exemple aux garderies, aux écoles primaires, etc. Mais aussi à l’environnement, à la diversité culturelle. À Midi Info, on essaie d’être plus inclusifs en ondes, d’avoir aussi une parité hommes-femmes parmi nos invités durant la semaine. Dans la vie, je n’ai pas des idées très arrêtées sur un sujet. J’aborde un sujet sous différents angles. Je n’aime pas le mot objectivité, mais j’aspire à une certaine neutralité. Au fil des émissions, on essaie d’offrir un point de vue équilibré. À mon avis, la population va toujours avoir besoin de comprendre le monde qui l’entoure. Et l’appétit pour de bonnes histoires, ça ne changera pas, peu importe le modèle médiatique. »

La crise de confiance envers les médias traditionnels

Monic Néron : « Ça m’inquiète, cette crise de confiance d’une partie de la population. Je le prends personnel, car je sais que tout bon journaliste fouille, vérifie et contre-vérifie ses informations avant de les sortir. Au-delà de ce constat, je veux comprendre pourquoi la confiance a disparu. Parce qu’il y a des choses qui nourrissent la méfiance de ces gens-là depuis quelques années. On doit donc se demander pourquoi ils délaissent les médias traditionnels. En étant à l’écoute. En essayant de trouver des solutions et de reconstruire des ponts pour rétablir la confiance avec pas tout le monde, mais avec une bonne partie de ces gens. Moi, j’ai envie de travailler pour faire avancer la société, pour le bien commun. »

Alec Castonguay : « Je pense que le travail des journalistes n’a pas beaucoup changé. C’est la perception des gens sur notre travail qui a changé. Depuis que les réseaux sociaux nous balancent constamment des opinions préfabriquées, il y a moins de patience pour aborder des sujets complexes, qui exigent de la recherche, une collecte d’information et de la rigueur intellectuelle. Les gens ne lisent que les titres. Un sujet sort… et il faut se forger son opinion dans la prochaine heure ! Si tu essaies d’apporter des nuances, les gens se braquent rapidement. Ils ne veulent pas écouter les différents points de vue. »

Philippe-Vincent Foisy : « C’est vrai qu’on a tendance à se mettre dans un camp, à se conforter dans ses positions, ses préjugés, avec juste des gens qui pensent comme nous. Si tu crois que je suis contrôlé par le gouvernement, qu’on me paie pour mentir aux gens, alors viens m’expliquer pourquoi et comment tu penses cela. Pour se comprendre, il faut d’abord se parler. Dans le respect. C’est le manque de respect qui est problématique. Comme société, il ne faut pas aller là. »

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Depuis deux semaines, Alec Castonguay est à la barre de Midi Info, succédant à Michel C. Auger à cette émission phare d’ICI Radio-Canada Première.

Alec Castonguay : « J’ai une théorie là-dessus. Avec la pandémie, le tamis social a disparu. Depuis 18 mois, on voit moins de gens. On a moins de relations sociales. On s’enferme dans notre silo d’opinions sur nos réseaux. J’ai l’impression que lorsque la vie va reprendre un cours plus normal, la polarisation va baisser d’un cran. Je l’espère… Et je crois que la radio, parce qu’elle entre dans leur intimité, peut amener les gens à réfléchir, à nuancer. Et avoir plus d’empathie… »

Qui fait quoi ?

Alec Castonguay

Depuis deux semaines, Alec Castonguay est à la barre de Midi Info, succédant à Michel C. Auger à cette émission phare d’ICI Radio-Canada Première qui analyse l’actualité à chaud. Cet ancien reporter émérite entre autres au Devoir et à L’actualité (il a remporté cinq prix Judith-Jasmin) est entouré de reporters à l’information de Radio-Canada, et aussi de collaborateurs réguliers comme Lise Bissonnette et Paul Journet. Midi Info est diffusée en semaine au 95,1, de 11 h 30 à 13 h, et en format rattrapage sur Ohdio.

Philippe-Vincent Foisy

Le nouveau et jeune (32 ans) morning man de QUB radio anime depuis le 16 août son émission du matin en semaine, de 6 h à 8 h ; en plus d’intervenir durant la journée à LCN. Mordu de politique et d’actualité, Philippe-Vincent Foisy décortique les plus récentes nouvelles en compagnie d’observateurs vedettes de Québecor, dont Mario Dumont, Benoit Dutrizac, Michel Girard, Jean-François Baril… On peut l’écouter en direct ou en balado, sur le site de qub.radio, l’application mobile ou encore en syntonisant le poste 600 sur Hélix et 601 sur Illico.

Monic Néron

Dès le 4 septembre, Monic Néron animera un tout nouveau rendez-vous hebdomadaire sur ICI Première. Diffusé le samedi à 16 h, Le genre humain se donne le mandat de « décortiquer des enjeux de société ancrés dans l’actualité avec un point de vue citoyen et humain ». L’animatrice pourra compter sur un bassin de collaborateurs, tels que Mylène Moisan, Émile Proulx-Cloutier, Pascale Renaud-Hébert, Pierre Curzi, Webster et Guillaume Lambert, entre autres. L’équipe va aussi « tendre l’oreille aux auditeurs », en diffusant l’une de leurs histoires chaque samedi.

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Alec Castonguay, Monic Néron et Philippe-Vincent Foisy