Un rapide coup d’œil aux mouvements des indices boursiers américains S&P 500 et NASDAQ donne l’impression que nous sommes en train de connaître une excellente année boursière. Ils affichent des hausses de près de 15 % et de 30 % respectivement. Mais cela pourrait être un mirage, prévient Guy Côté, gestionnaire de portefeuilles à la Financière Banque Nationale. Survol.

En y regardant de plus près, on constate que les indices Dow Jones aux États-Unis et S&P/TSX au Canada peinent tous les deux à se maintenir en territoire positif. La raison est que quelques gros titres du secteur de la technologie, les Google, Meta, Microsoft et Apple entre autres, viennent fausser la donne. Compte tenu de leur pondération dans l’indice NASDAQ d’abord et, dans une moindre mesure, l’indice S&P 500, leurs performances à la suite de l’emballement pour tout ce qui touche de près ou de loin à l’intelligence artificielle font que ces géants boursiers sont à la source de ces résultats.

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Guy Côté, gestionnaire de portefeuilles à la Financière Banque Nationale

« Si vous faites abstraction de ces quelques titres, les bourses ne produisent que très peu de rendement cette année », conclut Guy Côté.

La probabilité d’un changement rapide de l’attitude des investisseurs demeure plutôt mince pour l’instant. Les hausses de taux d’intérêt au cours de la dernière année ont eu raison de leur enthousiasme pour à peu près tout ce qui est autre que la technologie.

Même les banques canadiennes, qui se veulent le point d’ancrage des investisseurs canadiens à la recherche de rendement et de sécurité, n’ont pas tenu le coup depuis l’été et elles affichent des reculs significatifs pour l’année.

Lors de la dernière réunion, le 23 septembre, de la Réserve fédérale américaine, le président, Jerome Powell, n’a laissé aucune ambiguïté quant à un renversement prochain de la tendance des taux d’intérêt. Il pourrait même y avoir une nouvelle hausse avant la fin de l’année. En s’appuyant sur les marchés à terme des taux d’intérêt, les probabilités sont de 38 % aux États-Unis et de 56 % au Canada, signale Guy Côté. « On ne semble pas avoir atteint encore le point pivot des taux d’intérêt », dit-il.

Que faire alors ?

Les épargnants et les investisseurs sont certes déçus de leur rendement jusqu’à maintenant cette année, mais ils doivent tout de même comprendre qu’il n’y a là rien de catastrophique, souligne Daniel Chartier, gestionnaire de portefeuilles chez Valeurs mobilières Desjardins. « En regardant 10 ou 15 ans derrière, on constate que nous avons vécu des périodes beaucoup plus imprévisibles, telles entre autres la crise financière de 2008-2009 et la pandémie », dit-il.

Malgré un contexte néanmoins difficile en ce moment, les règles fondamentales d’une bonne gestion de portefeuille ne changent pas, selon lui. « La répartition d’actifs en fonction de ses objectifs demeure pour l’investisseur la pierre angulaire de sa stratégie de placement », dit-il.

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Daniel Chartier, gestionnaire de portefeuilles chez Valeurs mobilières Desjardins

Modifier son portefeuille soudainement pour tirer avantage des titres qui ont montré une forte tendance comporte de gros risques.

Daniel Chartier, gestionnaire de portefeuilles chez Valeurs mobilières Desjardins

Il faut également éviter les titres qui ont atteint des multiples d’évaluation très élevés, surtout ceux fortement endettés, selon lui.

Par ailleurs, la situation est propice pour tirer avantage des taux de rendement élevés qu’offrent les titres à revenu fixe, soit les certificats de dépôt et les obligations, croit-il. Quant aux marchés boursiers, les banques et le secteur de la téléphonie, grâce aux dividendes qu’ils versent, deviennent de plus en plus attrayants, souligne-t-il.

Place à la prudence

Comme on ne sait toujours pas où se situe le point pivot des taux d’intérêt, le contexte se prête à la prudence, croit Guy Côté. Pour lui aussi, les secteurs des banques et de la téléphonie sont intéressants, tout comme l’encaisse qui offre un bon rendement sans risque. Il ajouterait également le secteur de la consommation de base, soit les produits de première nécessité et le commerce au détail.

Quant aux titres technologiques, il en faut dans son portefeuille pour assurer un bon équilibre, selon lui. « L’intelligence artificielle va continuer d’être un secteur porteur, mais il faut être opportuniste et suffisamment discipliné pour acheter ces titres lors des corrections », dit-il.