Des promoteurs immobiliers iront bâtir en Ontario plutôt qu’ici si Québec ne copie pas le fédéral au sujet du remboursement complet des taxes de vente sur les nouveaux logements locatifs.

C’est le message envoyé par l’industrie immobilière au ministère des Finances du Québec dans le cadre des consultations en amont de la mise à jour financière prévue le 7 novembre.

L’Institut de développement urbain du Québec (IDU), lobby des promoteurs immobiliers, a rencontré La Presse lundi pour faire connaître ses attentes.

Jusqu’à maintenant, le gouvernement Legault a refusé de suivre l’exemple du gouvernement fédéral et de rembourser en totalité la TVQ perçue sur les nouveaux logements. En revanche, quatre provinces, dont l’Ontario, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse, l’ont fait.

« Le remboursement de la TVQ, c’est notre principale demande », affirme Isabelle Melançon, PDG de l’IDU.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Isabelle Melançon, PDG de l’Institut de développement urbain du Québec

On en a besoin si on veut arriver à concurrencer le reste du pays. L’important, ce sont les fuites de capitaux que ça peut engendrer si Québec ne va pas de l’avant avec le remboursement de la TVQ.

Isabelle Melançon, PDG de l’Institut de développement urbain du Québec

« On va aller ailleurs faire des appartements, affirme pour sa part le président du Groupe Mach, Vincent Chiara, qui accompagnait Mme Melançon pour l’occasion. On va aller à Toronto. On a aussi un projet qui est sur le point d’être en construction à Halifax. »

« On a des milliers de nouveaux logements qui sont sur la glace au Québec, poursuit-il. Au Quartier des lumières [sur le site de l’ancienne Maison de Radio-Canada, dans le sud-est du centre-ville de Montréal, réalisé en partenariat avec Devimco], tout est retardé possiblement pour deux ans. Mathématiquement, le projet ne tient plus la route. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Vincent Chiara, président du Groupe Mach, important promoteur immobilier de la métropole québécoise

Les chiffres ne fonctionnent pas avec les coûts de construction et les taux d’intérêt. On ne peut faire un projet qui donne un rendement de 4 % et assumer le risque d’exécution quand les bons du Trésor, sans risque, te donnent 6 %.

Vincent Chiara, président du Groupe Mach

Au centre-ville de Montréal, le niveau maximal des loyers se situe à 3 $ le pied carré, soit 1500 $ par mois pour un petit logement de 500 pieds carrés. À Toronto et à Vancouver, le loyer maximal varie entre 4 $ et 4,50 $ le pied carré, indique M. Chiara, ce qui donne aux constructeurs une plus grande marge de manœuvre.

Selon les plus récents chiffres disponibles, on se dirige vers 37 000 mises en chantier en 2023 au Québec, la pire année depuis 2001.

Si les conditions de marché que l’on connaît cet automne deviennent la norme au cours des prochains mois, l’IDU s’attend à ce que le nombre de mises en chantier continue de dégringoler en 2024.

Rabais de taux

La comparaison avec l’Ontario risque en effet d’être douloureuse, puisque le gouvernement Ford a adopté une série de mesures pour stimuler la construction, dont certaines touchent la rapidité avec laquelle les villes doivent délivrer les permis afin d’éviter de payer une pénalité. « Au Québec, ça prend de 12 à 18 mois pour avoir un permis », critique M. Chiara.

L’homme d’affaires convient que le remboursement de 100 % de la TVQ ne sera probablement pas suffisant à lui seul pour relancer la construction résidentielle. « Mais c’est sûr que ça va aider », croit-il.

Il souhaite que le gouvernement accorde, en parallèle, un rabais de taux d’intérêt de 2 points de pourcentage, une mesure dont il estime le coût à 800 millions pour 50 000 logements sans tenir compte des retombées pour le Trésor québécois.

Pour sa part, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) prévoit une remontée des mises en chantier à 41 000 en 2024. Le scénario de l’économiste Paul Cardinal repose sur une légère baisse des taux d’intérêt à partir du printemps 2024.

« Avec les réformes qui vont être en place, ça va créer un environnement qui va devenir plus intéressant du côté de l’Ontario et de la Colombie-Britannique », affirme-t-il. L’APCHQ joint sa voix à celle de l’IDU au sujet du remboursement de la TVQ.

La mesure ne fait pas l’unanimité pour autant. Pas plus tard que lundi, La Presse publiait une lettre ouverte d’Option consommateurs dans laquelle l’organisme s’opposait à la mesure coûteuse, car, selon ses signataires, elle n’apporte pas de solution à la « crise de l’abordabilité ».

La suite le 7 novembre lors de la mise à jour économique du ministre Eric Girard.

Lisez le texte « Il est temps de revoir la structure hypothécaire, pas de supprimer la TPS »
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    Augmentation moyenne des coûts de construction depuis 2021
    source : Institut de développement urbain du québec