Louer sa résidence secondaire pour dégager une marge de manoeuvre dans son budget peut être une idée intéressante. Il y a cependant plusieurs éléments à considérer avant de se lancer !

LE PROBLÈME

Catherine et son conjoint sont propriétaires d'une maison en banlieue de Montréal. L'an dernier, ils ont aussi terminé la construction d'une résidence secondaire dans Charlevoix. Le couple est en mesure de payer les deux hypothèques. Mais au quotidien, leur budget est plus serré qu'ils le souhaitent.

« Nous avons un bon rythme de vie et nous n'avons pas l'habitude de nous priver, confie-t-elle. Avec les comptes d'électricité en double, les taxes municipales et scolaires, on commence à trouver le temps long. Plus ça va, moins on respire. Nous voudrions envoyer notre fille à l'école privée, faire des voyages et quelques travaux de rénovation. »

De plus, étant donné la distance entre leur demeure et leur chalet, ils n'y vont pas si souvent. D'où l'idée de le mettre en location pour payer une partie des frais. « Nous souhaitons toutefois continuer d'y aller pour le temps des Fêtes, la relâche, nos vacances d'été, etc., note Catherine. Je suis consciente que je vais perdre de la clientèle dans les semaines payantes. » En tout, la famille utiliserait le chalet 10 semaines par année. Il serait offert en location le reste du temps.

Selon une estimation conservatrice, elle pourrait gagner au moins 14 000 $ par an si elle louait son chalet 12 semaines par année. Évidemment, ce pourrait être plus si les clients sont au rendez-vous. Cela permettrait de payer les dépenses évaluées à 12 400 $. Cette somme exclut l'hypothèque, mais tient compte de la taxe touristique, des frais d'attestation, des honoraires d'une agence de location, etc. « Nous avions pensé louer le chalet de manière informelle, mais nous jugeons que le risque est trop grand, indique Catherine. Nous ne vivrions pas bien avec ça. »

À la retraite, dans une dizaine d'années, le couple souhaite vendre sa maison pour emménager dans le chalet. Il n'y aura plus de location à partir de ce moment-là. Il se questionne sur la meilleure stratégie à adopter d'ici là. « Est-ce que cela pourrait nous nuire pour nos impôts ? demande Catherine. À quelles déductions pouvons-nous nous attendre ? Faut-il réclamer la TPS et la TVQ ? Est-il préférable de constituer une entreprise pour la gestion du chalet ? Quel sera l'impact sur le calcul du gain en capital ? » Bonnes questions !

LES CHIFFRES

Revenu de Catherine : 86 000 $ par année

Revenu du conjoint : 89 000 $ par année

Valeur du chalet : 299 500 $

Hypothèque du chalet : 238 000 $

Estimation des revenus de location : 14 000 $ par année (minimum)

Estimation des dépenses annuelles du chalet : 12 400 $

LA SOLUTION

Évidemment, les revenus générés par le chalet devront être déclarés et ils seront imposables. Actuellement, le taux marginal d'imposition du couple est de 41,11 %. Si les revenus de Catherine et de son conjoint dépassaient 93 000 $, ce taux grimperait à 45,71 %. Ils paieraient donc un peu plus d'impôt, mais ils auraient aussi des revenus plus élevés pour le faire.

Par contre, une bonne partie des dépenses sera déductible d'impôt, puisqu'elles sont effectuées pour gagner un revenu. « L'impact au niveau fiscal serait donc minime », indique Louis-Philippe Toupin, planificateur financier et directeur de division (Brossard), chez Groupe Investors.

Surtout que le couple a oublié d'inclure les intérêts hypothécaires dans ses dépenses. C'est donc plus de 6000 $ supplémentaires qui pourraient être déductibles la première année. « Si les dépenses déductibles sont plus élevées que les revenus, la perte locative pourrait permettre de réduire l'impôt payé sur les revenus d'emplois », ajoute au passage Normand Clermont, CPA CA, directeur régional, Boucherville-Brossard, chez Groupe Investors.

Le couple doit cependant pouvoir démontrer que le chalet était réellement offert en location pendant les semaines visées et qu'ils ont fait des efforts raisonnables pour le louer. Faire affaire avec une agence de location est donc une excellente idée. Cela permettra d'en faire la preuve plus facilement, estime M. Clermont. De plus, les frais payés à l'agence seront aussi déductibles d'impôt. « Il faut aussi avoir des expectatives raisonnables de profits », précise Geneviève Leroux, fiscaliste au Groupe Investors. Les dépenses liées à leur utilisation personnelle ne sont pas déductibles.

TAXES ET INCORPORATION

Tant que les revenus de location sont de moins de 30 000 $ par an, le couple n'a pas à s'inscrire aux fichiers de la TPS et de la TVQ. Ni à réclamer les taxes à ses clients, bien entendu ! S'ils arrivent à cette somme, ils pourront s'inscrire, tout simplement.

Quant à l'incorporation, elle n'est ni nécessaire ni souhaitable, estime Mme Leroux. L'impôt à payer serait encore plus élevé et il faudrait acquitter différents frais comme ceux d'incorporation.

IMPÔT SUR LE GAIN EN CAPITAL

Finalement, lorsqu'une résidence secondaire personnelle commence à être offerte en location, il y a un changement d'usage. Cela entraîne une disposition réputée et il peut y avoir un impôt sur le gain en capital à payer. Il existe des stratégies pour reporter cet impôt, mais ce n'est pas vraiment nécessaire dans le cas présent. « Comme ils viennent tout juste de le construire, il n'y aura pas ou très peu d'impôt à payer », signale M. Toupin.

Dans 10 ans, lorsqu'ils iront habiter le chalet pour de bon, il n'y aura aucune conséquence fiscale. Il suffira d'en informer le gouvernement, explique Mme Leroux. Au moment de la vente du chalet ou de la mort des propriétaires, il y aura toutefois de l'impôt sur le gain en capital à payer pour les 10 années où il aura été offert en location.