Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Randall Kelly, de Formula Growth.

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À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

Cette semaine, nous avons écouté attentivement les propos du patron de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke. Il nous a semblé qu'il revenait un peu sur ses pas, dans son approche de détente quantitative. Dans son message, nous n'avons pas vu la trace d'une troisième phase de détente (QE3). Nous avons le sentiment que la vague de l'argent facile tire à sa fin. Mais quant à nous, ce n'est pas si grave. Ce ne sont pas les taux d'intérêt très faibles qui font tourner le monde. Bien sûr, nous aimons que la Fed soit accommodante, mais ce n'est pas le facteur déterminant.

Quel indicateur surveillez-vous le plus attentivement en ce moment?

Les entreprises commencent à dévoiler leurs résultats du quatrième trimestre de 2011 et à donner des indications pour l'année 2012. Nous allons analyser les résultats et discuter avec les dirigeants des sociétés. Bien franchement, les résultats continuent d'être très solides. De notre point de vue, cela est bien plus important que ce que la Fed fait ou pas.

En plus, les entreprises américaines ont un bilan spectaculaire. Elles sont assises sur des liquidités d'environ 3000 milliards de dollars. Cela donne lieu à d'importants programmes de rachat d'actions par les entreprises qui jugent que leur titre représente une belle valeur. Cette semaine, par exemple, Liberty Global a lancé un rachat d'actions de plus d'un milliard de dollars.

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir?

Je mettrais les 10 000$ dans les actions. J'investirais la moitié dans des petites entreprises américaines en croissance. Présentement, leurs actions ne sont pas plus chères que celles des multinationales, même si elles ont des perspectives de croissance beaucoup plus importantes.

Une de mes préférées est Spirit Airlines (Nasdaq, SAVE) dont l'action se négocie à moins de huit fois ses profits de 2013. Il s'agit du transporteur aérien le meilleur marché des États-Unis. C'est le Dollarama du transport aérien!

Avec l'autre moitié, j'achèterais des actions à la Bourse de Hong Kong pour profiter de la croissance de l'Asie Pacifique.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

J'éviterais les titres qui procurent un revenu qui ont été très populaires dernièrement. Tout le monde s'est réfugié dans les obligations (gouvernementales et corporatives), dans les actions à dividendes élevés, dans les fiducies immobilières. La quête de rendement des investisseurs a poussé tous ces titres... mais je crois que la tendance s'achève.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus actuellement?

Je pense que les investisseurs sous-estiment la valeur des actions. Ils sont trop préoccupés par le risque et la sécurité. Il faut toujours s'en préoccuper. Mais je crois que le marché va trop loin. Je suis ébahi de voir que depuis septembre, les investisseurs ont retiré 76 milliards des fonds communs américains. Durant la même période, le S&P500 a avancé de 20% et le Russell 2000 de 38%.

Pour reprendre l'expression de l'ancien patron de la Fed Alan Greenspan, ça ressemble à du pessimisme irrationnel! Moi, je préfère être optimiste, la plupart du temps, car je ne connais pas beaucoup de perpétuels pessimistes qui font de l'argent!

Le public garde en tête la période 1999 à 2009, durant laquelle on a connu des rendements négatifs sur 10 ans. Je sais que c'est long. Mais depuis le creux de 2009, le S&P500 a doublé et les petites sociétés américaines ont bondi de 130%.

Rendall Kelly est président et chef de la direction de Formula Growth où il travaille depuis 1984. La firme montréalaise fondée par John Dobson gère près de 400 millions de dollars. Elle est spécialisée dans les actions de petites sociétés américaines de croissance. Pionnier des fonds communs, son Formula Growth Fund a livré un rendement annuel de 12% depuis sa création en 1960.