Fatiguée. Oui, à quelques jours de Noël, Linda, de Montréal, se sent épuisée. À 59 ans, elle se dit qu'elle travaille trop et qu'il est temps pour elle de prendre la vie un peu plus relaxe.

«Au travail, je cours toute la journée; quand la fin de semaine arrive, je n'ai jamais assez de temps pour faire ce dont j'ai vraiment envie», dit cette adjointe juridique, qui travaille dans un grand cabinet d'avocats du centre-ville de Montréal.

Sans conjoint ni enfant, Linda travaille à contrat. Celui-ci devrait se terminer l'été prochain. Si c'était possible, elle souhaiterait pouvoir travailler quatre jours au lieu de cinq. Pas qu'elle ait de grands besoins, au contraire, elle est plutôt modeste de ce côté-là: vélo, natation, lecture, cuisine, télé, peut-être prendre des cours à l'occasion, faire un ou deux voyages par année. Rien d'extraordinaire, juste avoir un peu plus de temps pour elle.

«Cela améliorerait grandement ma qualité de vie», dit-elle.

Évidemment, la solution idéale serait de prendre une retraite définitive à 60 ans, c.-à-d. en avril prochain. Mais Linda est convaincue qu'elle n'en a pas les moyens, parce que, croit-elle, elle n'a pas de fonds de retraite d'employeur. De toute façon, elle n'est pas tout à fait certaine de vouloir arrêter complètement tout de suite. Une retraite progressive pendant quelques années, à raison de 4 jours/semaine, ferait aussi son affaire.

Un budget

Au fil des ans, même si elle a souvent travaillé d'un contrat à un autre, Linda a réussi à mettre de l'argent de côté. En REER, elle en a pour près de 180 000$; elle cotise d'ailleurs le maximum chaque année. Elle possède aussi pour près de 260 000$ en placements hors REER. Elle est de plus propriétaire d'un condo évalué à 200 000$ et libre d'hypothèque.

Pour Linda, le planificateur et actuaire Dany Provost, vice-président chez Planium, s'est mis au boulot. La première chose à faire dans un cas comme ça, dit-il, est de faire un budget afin de déterminer son train de vie. Il a donc demandé à Linda de lui préparer un état sommaire de ses dépenses. Résultat: environ 20 800$ par année.

Côté revenus, Linda gagne actuellement 54 000$ par an. Si elle passe à 4 jours par semaine, son revenu estimé serait d'environ 43 000$. Même à temps réduit, on voit bien que ses revenus couvrent largement ses dépenses. Mais si elle arrête complètement, que se passe-t-il? Et si elle travaille 4 jours/semaine, à quel âge pourrait-elle arrêter complètement?

Pour répondre à ces questions, le spécialiste a sorti sa calculette. Et s'est ensuite attelé à concocter divers scénarios.

D'abord, une bonne nouvelle! Si elle le désire, Linda pourra ranger ses crayons pour de bon et dire bye-bye à ses avocats-patrons dès 60 ans. En prenant pour hypothèses un taux d'inflation de 2,25%/ an et un taux de rendement sur les actifs financiers de 3%/an, Dany Provost estime que si Linda se retire dès l'an prochain, elle pourra maintenir son train de vie jusqu'à 92 ans. Et encore, dit-il, ces prévisions sont plutôt prudentes, étant donné son profil d'investisseur conservateur.

Sauf que, indique le planificateur, la probabilité qu'une femme de 60 ans comme Linda survive plus longtemps, jusqu'à 95 ans, est de 25%, selon les tables de mortalité suggérées pas l'Institut québécois de planification financière. Pour se rendre jusque-là, Linda n'a pas à s'en faire; elle n'a qu'à travailler un an de plus, à raison de 4 jours par semaine, comme elle le désire, et le tour est joué.

Chose importante à ne pas oublier, indique M. Provost, est que cette prévision est basée sur le budget de base fournit par Linda. Or, dit-il une variation des dépenses entraîne des conséquences. Par exemple, une simple augmentation de 1 000$ par année rapproche de deux ans le moment où ses comptes seront à sec. Dans le même ordre d'idée, chaque année de travail supplémentaire à 4 jours/semaine retarde d'environ deux ans et demi le moment où ses actifs financiers seront à zéro.

Linda pourrait par contre améliorer sa situation, notamment en investissant le 170 000$ hors REER qui dort dans un compte courant. Pour le moment, cette somme ne génère pas de revenus. Dans un premier temps, elle devrait commencer par mieux cerner son profil d'investisseur - qui n'est pas assez précis -, puis décider ensuite où placer cette somme.

Rente viagère

Cela dit, vu que Linda semble très prudente comme investisseur, Dany Provost estime qu'elle serait une bonne candidate pour l'achat d'une rente viagère. Une rente viagère est une rente versée à échéance fixe jusqu'au décès du bénéficiaire, en contrepartie du placement d'un capital. M. Provost lui suggère d'acheter cette rente avec ses placements enregistrés.

Selon ses calculs, cela lui donnerait droit à une rente viagère de 7534$ par année, indexée au coût de la vie. En ajoutant ce montant à ses retraits hors REER et à sa rente de la RRQ, Linda couvrirait ses dépenses. Mieux, cette solution lui permet de prendre sa retraite dès 60 ans et de maintenir son train de vie jusqu'à 94 ans, soit deux ans de plus que si elle continuait à gérer ses REER elle-même.