Chaque samedi, un financier différent répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, André Chabot, de Triasima.

Quel est l'élément le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

Il y a eu trois événements importants. En premier lieu, les élections américaines. Le retour vers le centre, à partir d'une présidence démocrate qui était quand même assez à gauche, devrait être bénéfique à long terme pour les marchés financiers. Le gouvernement avait une approche interventionniste depuis l'arrivée du président Obama. Et le sentiment était rendu très négatif, aux États-Unis, notamment face à la réforme de la santé.

Autre événement important: la Banque centrale américaine a entamé un nouveau cycle d'apport de liquidités dans le système financier. Nous, on croit que cela n'aura pas d'effet bénéfique. La Fed va imprimer des billets pour acheter principalement des obligations de 10 ans. Pourquoi? Pour faire baisser les taux d'intérêt? Mais ils sont déjà très, très bas! C'est une croisade désespérée. Il y a tellement eu d'augmentation de liquidités, les taux d'intérêts sont déjà tellement bas, il faut donner le temps à l'économie d'absorber tout ça. Il ne sert à rien d'en ajouter quand ça déborde. Ce n'est pas le manque de liquidité qui est le problème, c'est juste que les gens sont prudents. Et c'est normal quand on sort d'une crise aussi profonde.

Enfin, le Canada a bloqué l'acquisition de Potash par des intérêts étrangers. L'acquisition était très mal vue par les électeurs de la Saskatchewan. Alors, le gouvernement conservateur a fait quelque chose contre-nature, strictement pour des raisons politiques. Pour les marchés, cela aura un petit effet déprimant, mais sans plus.

Quel indicateur surveillez-vous le plus attentivement en ce moment?

On surveille les indicateurs les plus coïncidents. Je pense à la production industrielle ou encore la consommation discrétionnaire, dont les données sont diffusées mensuellement, avec peu de délai. Si on utilise des moyennes sur 4 à 6 mois, ces données demeurent bonnes.

Aussi, le volume de transport par camions et par trains, ainsi que le transport de passagers sur les lignes aériens, sont en augmentation. Ça nous confirme que la reprise économique est en place, même si elle n'est pas extrêmement forte.

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir?

On achèterait des actions. On vient de vivre une des pires baisses de l'histoire de la Bourse. Oui, les marchés ont rebondi. Mais le cycle peut encore durer quelques années. On privilégierait les actions américaines, mais aussi celles de pays d'Amérique latine qui ont une forte croissance intérieure, comme le Brésil qu'on peut acheter à travers un fonds indiciel (NY, EWZ).

À la Bourse américaine, on aime bien la société Emerson Electric (NY, EMR) dont la stratégie est d'augmenter ses revenus à l'extérieur des États-Unis. Dans le secteur de la santé, plus précisément dans les services ou dans la fabrication d'équipement médical, il peut y avoir des perles, comme Becton Dickinson (NY, BDX). On aime aussi le secteur de la consommation discrétionnaire, avec une société comme Dollar Tree (Nasdaq, DLTR), un mélange de Wal-Mart et de Dollarama.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

C'est difficile de répondre, car nous sommes assez positifs. On est à l'aise à court terme. Mais les fiducies immobilières qui offrent des distributions de 5 à 8% ont tellement augmenté... ce serait un créneau où il faudrait faire attention.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus présentement?

Un rebond du dollar américain serait vraiment une grande surprise pour le marché. Cela aurait un impact négatif sur le prix des denrées et de l'or. Personne n'y croit en ce moment. Mais, à plus long terme, cela pourrait se produire, au fur et à mesure que la reprise économique va faire son petit bonhomme de chemin.