Mireille a travaillé dès l'âge de 20 ans, pendant 45 ans. Aujourd'hui, à 71 ans, elle décrit d'une voix posée sa vie tranquille dans son petit appartement montréalais.

«Mes besoins ne sont pas très grands... J'aimerais peut-être avoir un meilleur logement. Quand je tomberai malade et qu'il faudra me trouver une place, à 85 ans peut-être, j'aimerais un milieu assez bien.»

Mais aura-t-elle les fonds pour se l'offrir? «Si, selon mes gènes, je meurs à un âge très avancé, mes avoirs s'épuiseront, craint-elle. C'est pourquoi je songe à une rente viagère.»

Retraitée depuis six ans, elle touche un revenu de 17 000$ provenant de la Régie des rentes du Québec et de la Sécurité de la vieillesse.

«Je n'ai aucun autre revenu, si ce n'est les sous que je dois puiser dans mon fonds de retraite autogéré.»

Elle détient un fonds de revenu viager (FRV) de 21 500$, 449 000$ en REER, et des épargnes d'environ 70 000$.

Ses dépenses courantes totalisent 28 000$, auxquelles elle souhaite ajouter un voyage de 5000$ à chacune des cinq prochaines années.

«Je vis seule mais je ne suis pas seule dans la vie, précise-t-elle. J'ai encore des soeurs, des neveux et des nièces.»

Elle aimerait leur léguer quelques biens.

L'intérêt d'une rente

Rappelons d'abord qu'une rente viagère est une rente versée la vie durant, généralement par un assureur vie, en retour du capital que le rentier lui cède. Le montant de la rente mensuelle dépend bien sûr de l'ampleur de ce capital, mais également de l'espérance de vie du rentier et des intérêts que l'assureur estime pouvoir toucher sur cette somme.

«Une rente viagère protège contre le risque du placement et surtout contre le risque de survie», explique la planificatrice financière et actuaire Nathalie Bachand, de Bachand Lafleur Preston Groupe Conseil.

La rente viagère pure cesse à la mort du rentier, même s'il s'agit d'un accident survenu à peine deux mois après la signature du contrat. Pour éviter cette issue désagréable - notamment aux yeux des héritiers du rentier -, la souscription peut être assortie d'une garantie de cinq, dix, quinze ans... Si le rentier meurt avant la fin de la garantie, la rente continuera d'être versée aux ayants droit pour la durée restante. Évidemment, une telle assurance a un prix.

Question de comparer les différentes avenues, Mme Bachand a d'abord analysé la situation actuelle de Mireille. Pour ses placements, la planificatrice a retenu un rendement de 4%, établi en fonction de la répartition des actifs de Mireille et des normes d'hypothèses de projection de l'Institut québécois de planification financière.

Ces normes recommandent que l'âge d'épuisement du capital, celui où les épargnes se trouvent à sec, corresponde à une probabilité de survie de 25%. Pour Mireille, qui est déjà parvenue à 71 ans, cette probabilité équivaut à 95 ans.

Les personnes qui ont 71 ans au 1er janvier doivent respecter certains critères minimaux de décaissement de leurs épargnes enregistrées. Il faut retirer chaque année un minimum de 7,38% de son Fonds de revenu viager (FRV) et de son Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR). En 2010, Mireille devra donc en retirer environ 35 000$.

«Avec ses rentes gouvernementales, son retrait minimum du FERR et du FRV et ses revenus d'intérêts, elle aura des revenus avant impôt de l'ordre de 55 000$», énonce Mme Bachand. Sous l'effet d'un taux d'imposition de 25,6%, son revenu net s'établirait à un peu plus de 40 000$.

Dans ces conditions, elle aura totalement épuisé ses épargnes à... 105 ans. Mais si elle décède à 95 ans, elle laissera encore à ses héritiers une somme de 230 000$ après impôts.

Supposons maintenant l'achat d'une rente viagère sans garantie avec 200 000$ de ses REER. Selon une cotation estimative obtenue en novembre 2009, Mireille pourrait en tirer une rente mensuelle de 1472$. S'y ajoutent les retraits obligatoires du solde de son REER - 250 000$ -, ceux du FRV, plus les rentes gouvernementales, pour un revenu total de 57 600$.

«Comme la rente est fixe et garantie toute la vie, une fois son espérance de vie dépassée, elle a gagné son pari contre l'assureur, fait valoir notre planificatrice. C'est pourquoi ses épargnes seront entièrement décaissées plus tard que dans le premier scénario, soit à 120 ans! Dans le scénario de la rente viagère, si elle décède à l'âge de 95 ans, elle léguera une somme de 320 000$ après impôts.»

Cette rente viagère sans garantie cessera dès son décès. Une rente avec garantie réglerait l'inconvénient d'un décès prématuré, mais au prix d'une rente réduite.

«L'achat d'une rente nous apparaît une solution tout indiquée pour Mireille», conclut Mme Bachand.

LES DONNÉES

Mireille, seule et sans enfant, est âgée de 71 ans. Compte tenu d'une hérédité favorable, elle prévoit avoir encore de longues années de retraite devant elle. Devrait-elle considérer une rente viagère?

LES PARAMÈTRES

Mireille, 71 ans

RRQ et PSV: 17 200$ par année

REER: 449 000$

Fonds de revenu viager: 21 500$

Épargnes hors REER: 66 500$

CELI: 5000$

Aucune propriété

LA RÉPONSE

Si Mireille atteint 95 ans - ce qui correspond à 25% de probabilité de survie -, l'achat d'une rente viagère pour 200 000$ aura été nettement plus rentable que le statu quo.