(New York) La fermeture du port de Baltimore, inaccessible pour une durée indéterminée depuis l’effondrement spectaculaire d’un pont autoroutier percuté lundi par un porte-conteneurs, devrait avoir un effet limité sur l’économie des États-Unis grâce aux capacités d’accueil des infrastructures portuaires de la côte Est.

« Il va y avoir des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement, mais je ne pense pas qu’il y aura un effet macroéconomique parce qu’il y a tellement de grands ports très proches de Baltimore », a indiqué à l’AFP Ryan Sweet, économiste en chef d’Oxford Economics.

Il n’anticipe pas de « vaste choc d’approvisionnement » qui affecterait l’inflation et le produit intérieur brut (PIB) des États-Unis.

Et les constructeurs automobiles, qui utilisent tout particulièrement ce port, « disposent de stocks plus élevés qu’il y a quelques années ».

« Comme pour beaucoup de constructeurs, le port de Baltimore est une partie cruciale de la chaîne logistique de Mazda aux États-Unis », a relevé le groupe japonais, précisant être « en train d’évaluer les impacts potentiels d’une fermeture prolongée ».

« À ce stade, nous n’avons pas finalisé de plan alternatif », a-t-il ajouté.

D’après l’agence Bloomberg, Mazda a été le plus gros importateur automobile à Baltimore, en valeur, en mars, loin devant l’allemand Mercedes et le japonais Subaru.

Ford a « déjà assuré des alternatives maritimes ». Son concurrent Stellantis (Jeep, Chrysler, Fiat, etc.) discute de « solutions de rechange » avec ses transporteurs.

Le ministre américain des Transports Pete Buttigieg a mentionné mercredi « quatre axes importants : rouvrir le port, gérer les implications au niveau de la chaîne d’approvisionnement […], rebâtir le pont – un maillon clef du périphérique de Baltimore – et gérer la circulation routière » en attendant.

« Reconstruire [le pont] ne sera pas rapide, ni simple, ni bon marché », a-t-il ajouté, se refusant à émettre des estimations.

New York « prêt »

Selon la Maison-Blanche, le président Joe Biden compte se rendre sur place dès qu’il sera sûr de ne pas perturber les opérations sur place.

Le géant danois du transport maritime Maersk – par ailleurs affréteur du MV Dali qui a percuté le pont – a prévenu ses clients que les cargos seraient déchargés dans d’autres ports, ce qui pourrait entraîner des retards.

Selon la plateforme Container xChange, qui estime que plus de quarante cargos sont bloqués dans le port de Baltimore, changer de parcours pourrait accroître les tarifs d’acheminement.

Le port de New York-New Jersey (NYNJ), à environ deux jours de navigation au nord de Baltimore, « se tient prêt », a affirmé Bethann Rooney, sa directrice.

Selon un expert du secteur, ce port accueille en un mois et demi autant de conteneurs que Baltimore en un an. Et il a des capacités disponibles car il gère actuellement 20 % de moins de conteneurs qu’en 2021.

De plus, « la plupart des navires qui vont à Baltimore s’arrêtent d’abord à New York-New Jersey. C’est comme une ligne de bus », avec des arrêts le long de la côte Est, explique-t-il à l’AFP, précisant que le Dali y avait fait escale autour du 19 mars.

« Il ne s’agira pas vraiment de navires supplémentaires, mais de davantage de cargaison déchargée », poursuit cette source, relevant que 60 % à 70 % des cargaisons sont déjà déchargées dès NY-NJ.

« Importance économique »

D’après l’Association du commerce maritime du Pacifique (PMSA), Baltimore a géré en 2023 1,12 million de conteneurs équivalent 20 pieds (EVP, mesure du secteur). Le port de NY-NJ est troisième aux États-Unis, avec 7,81 millions d’EVP.

C’est Baltimore et, plus largement, l’État de Maryland, qui devraient souffrir le plus.

Le gouverneur de l’État Wes Moore a souligné sur CNN l’« importance économique » du port de Baltimore, où arrivent environ 51 millions de tonnes de marchandises internationales.

Le site internet du port précise qu’il génère près de 3,3 milliards de dollars en salaires, emploie directement environ 15 000 personnes et soutient indirectement près de 140 000 emplois.

Il est desservi par une cinquantaine de transporteurs maritimes, faisant quelque 1800 escales par an.

Il affirme avoir géré, en 2023, le plus de cargaisons de véhicules (847 158 automobiles et véhicules légers) de tous les ports américains – pour la 13année consécutive – ainsi que d’équipements agricoles et de construction, d’importations de sucre et de plâtre. Il était deuxième pour les exportations de charbon et, en 2022, sixième pour le café.

Le fleuve Patapsco, qu’enjambait le pont détruit, est également fréquenté par des navires de croisière.

La compagnie maritime Carnival Cruise s’est reportée sur le port de Norfolk (Virginie) et American Cruise Lines, qui opère en cette saison depuis la capitale fédérale Washington, fera « les ajustements nécessaires » pour ses circuits devant commencer en mai depuis Baltimore.