Des membres du conseil de direction de la Banque du Canada sont d’avis que le moment est venu de réduire les taux d’intérêt tandis que d’autres croient qu’il faut attendre parce qu’il y a des risques que l’inflation reparte à la hausse.

Cette division se reflète dans le compte-rendu des délibérations tenues au plus haut niveau lors de la semaine précédant la décision du 10 avril de maintenir le taux à son niveau de 5 %.

Depuis l’an dernier, la banque publie un résumé de la réunion de son conseil de direction qui précède chaque annonce sur le taux directeur, dont la dernière a eu lieu le 10 avril. Le document rendu public mercredi ne dit rien sur le ton de ces discussions, mais il indique pour la première fois une réelle divergence de vues à la Banque du Canada depuis le début de sa lutte à l’inflation.

« Malgré leurs points de vue différents quant au degré d’assurance supplémentaire nécessaire pour avoir la conviction que l’inflation était sur une trajectoire durable vers un retour à la cible de 2 %, ils ont convenu par consensus de maintenir le taux à 5 % », peut-on lire dans le document.

Deux sujets ont dominé les discussions des dirigeants de la banque centrale : la bonne performance de l’économie américaine et l’impact de la croissance démographique sur l’inflation au Canada.

La croissance plus forte que prévu de l’économie des États-Unis devrait continuer de soutenir l’économie canadienne, croit la banque centrale.

Quant à la forte augmentation de la population, elle aura un impact sur le coût du logement et sur l’inflation, selon la Banque du Canada. Une réduction des taux accélérera l’activité sur le marché du logement et alimentera l’inflation estime-t-elle.

« Un assouplissement de la politique monétaire pourrait accroître la probabilité que ce risque se concrétise, peu importe à quel moment s’amorcerait le cycle d’assouplissement », ont convenu les dirigeants.

Si tous s’entendent pour constater que l’inflation évolue dans la bonne direction, ceux qui croient que le moment n’est pas encore venu de baisser les taux ont eu gain de cause. Et quand le moment sera venu, les baisses seront graduelles, ont-ils prévu.

« Les membres avaient des divergences d’opinions quant au moment où les conditions seraient vraisemblablement réunies pour justifier une réduction du taux directeur, lit-on dans le document. Mais ils se sont entendus pour dire que les assouplissements monétaires seraient probablement graduels ».

La prochaine décision de la Banque sur les taux est le 5 juin.

Des données contradictoires

Les données sur les ventes au détail en février indiquent que l’économie canadienne continue de s’affaiblir, ce qui renforce les arguments en faveur d’une baisse de taux en juin. Après une baisse de 0,3 % en janvier, les ventes au détail ont encore reculé de 0,1 % en février, a fait savoir mercredi Statistique Canada.

Malgré la croissance de la population, les ventes au détail sont en baisse dans sept des dix provinces. Au Québec, le recul est de 0,1 % en mars. « Considérant la croissance démographique record au premier trimestre, les chiffres de ce matin suggèrent que les dépenses par personne ont été encore plus faibles que ce que laisse croire le résultat global », a commenté l’économiste de Desjardins Florence Jean-Jacob.

D’autres indicateurs, dont le Produit intérieur brut, envoient toutefois des signaux contradictoires. L’économie canadienne a commencé l’année mieux que prévu, avec un bond de 0,6 % en janvier et des données préliminaires qui pointent vers une hausse de 0,4 % en février. En rythme annualisé, les économistes s’attendent à une croissance de 2,5 % à 3 % au premier trimestre de 2024.