(Washington) La croissance du PIB des États-Unis a déçu au premier trimestre 2024, ralentissant plus qu’attendu et atteignant même son plus bas niveau depuis près de deux ans, après une année 2023 qui avait surpassé toutes les espérances.

La croissance du produit intérieur brut (PIB) des États-Unis a ralenti à 1,6 % en rythme annualisé sur les trois mois de janvier à mars, contre 3,4 % au 4e trimestre 2023, selon la première estimation du département du Commerce, publiée jeudi.

Ces données sont ajustées de l’inflation, c’est-à-dire que le calcul exclut les effets de la hausse des prix.

Une croissance de 2,2 % était attendue par les analystes, selon le consensus de Market Watch.

Le chiffre de 1,6 % aurait pu être une bonne nouvelle aux yeux des investisseurs, qui pensent que si l’économie américaine donne des signes de faiblesse, la Banque centrale (Fed) sera davantage encline à baisser ses taux d’intérêt directeurs.  

Mais dans le même temps, l’inflation sous-jacente, qui exclut les variations de l’énergie et de l’alimentation, a été plus forte qu’attendu.

Le président Joe Biden, qui brigue un second mandat à la Maison-Blanche, a lui salué dans un communiqué cette « poursuite d’une croissance régulière et stable ».

« Mais nous avons encore du travail à faire. Les coûts sont trop élevés pour les familles qui travaillent et je me bats pour les réduire », a-t-il promis, accusant ses adversaires républicains de n’avoir, eux, « aucun plan » pour cela.

Les États-Unis publient leur croissance en rythme annualisé, qui compare le PIB à celui du trimestre précédent puis projette l’évolution sur l’année entière à ce rythme.

Mais en la comparant simplement au trimestre précédent, comme le font d’autres économies avancées, la croissance est de 0,4 %.

« Perspectives incertaines »

Ce ralentissement « reflète principalement une décélération des dépenses de consommation, des exportations », et des dépenses publiques, détaille le département du Commerce dans son communiqué.

La consommation reste cependant le moteur de croissance de la première économie du monde, représentant plus des deux tiers du PIB. Mais c’est notamment en soins de santé, services financiers et assurances que les ménages américains ont dépensé plus.

« La lente augmentation du PIB au premier trimestre donnera probablement le ton pour le reste de 2024 », selon Ian Shepherdson, chef économiste pour Pantheon Macroeconomics.

« Les perspectives d’avenir sont incertaines. La vigueur du marché du travail devrait maintenir les dépenses des ménages et la croissance positives pour le moment », anticipe Rubeela Farooqi, cheffe économiste pour High Frequency Economics, dans une note.

Mais, alerte-t-elle, les cartes sont désormais dans les mains de la banque centrale américaine (Fed), alors que les évolutions de la croissance économique, de l’inflation, et de l’emploi, sont liées les unes aux autres.

La Fed souhaitait faire ralentir l’activité économique pour espérer voir l’inflation revenir à un niveau acceptable, et a donc relevé ses taux jusqu’à leur plus haut niveau 20 ans, renchérissant le coût du crédit.

Elle veut désormais commencer à les abaisser de nouveau. Mais un rebond de l’inflation début 2024 pourrait repousser de plusieurs mois ce moment, pour éviter de voir les prix flamber de nouveau.

Elle doit néanmoins veiller à ne pas démarrer trop tard, avertit Rubeela Farooqi, car cela, alors, « pourrait constituer un obstacle à la consommation et à la trajectoire de croissance au cours des prochains trimestres ».

FMI plus optimiste

La prochaine réunion de la Fed aura lieu mardi 30 avril et mercredi 1er mai.

L’institution de politique monétaire avait, lors de sa dernière réunion mi-mars relevé nettement sa projection de croissance du PIB pour 2024 lors de la dernière réunion, mi-mars, à 2,1 % au lieu de 1,4 % précédemment.

Le FMI aussi s’est récemment montré plus optimiste pour la croissance américaine en 2024, tablant sur 2,7 % de croissance dans ses prévisions économiques publiées la semaine dernière, contre 2,1 % seulement en janvier.

Car la croissance américaine avait surpris en 2023, se montrant bien plus vigoureuse que prévu, et déjouant haut la main les pronostics de récession. Elle avait même accéléré, à 2,5 %, contre 1,9 % en 2022.

La consommation, en effet, était restée solide, en dépit d’un pouvoir d’achat rogné d’un côté par l’inflation, de l’autre par la hausse des taux d’intérêt.

En 2020 et 2021, le PIB américain avait fait le yo-yo, battant des records dans un sens puis dans l’autre.  

Il avait d’abord enregistré son plus fort recul depuis 1946 (-3,5 %) à cause de la COVID-19, avec même deux mois de récession, puis la plus forte croissance depuis 1984 (+5,9 %).