L’économie canadienne continue de flirter avec la récession, mais ne succombe pas. Le produit intérieur brut (PIB) a augmenté de 0,1 % en novembre, selon Statistique Canada, dont les estimations préliminaires pointent vers une croissance toujours positive pour le dernier trimestre de 2022.

Si ça s’avère, le Canada aura connu une croissance économique de 3,8 % l’année dernière, malgré l’inflation élevée et les hausses de taux d’intérêt.

« Il ne faut pas se réjouir trop vite », préviennent les économistes de la Banque Nationale Matthieu Arseneau et Alexandra Ducharme, en précisant que les estimations de Statistique Canada sont souvent révisées. L’économie canadienne continuera de ralentir alors que les consommateurs réduisent leurs dépenses et que l’activité diminue dans le secteur de la construction.

« Dans un contexte de politique monétaire extrêmement restrictive, nous continuons de nous attendre à une quasi-stagnation pendant la majeure partie de 2023. »

En novembre, la production a quand même continué d’augmenter dans 14 des 20 secteurs d’activité économique, rapporte mardi Statistique Canada. C’est le secteur des services qui a maintenu le PIB en terrain positif, en avançant de 0,2 %, alors que la production de biens affiche une baisse de 0,1 %.

L’enthousiasme des voyageurs, après la levée des dernières restrictions sur les voyages, a poussé le transport aérien, qui est en hausse de 4,6 %. C’est la 10e hausse mensuelle consécutive de l’activité des transporteurs aériens, qui reste toutefois inférieur de 31 % à ce qu’elle était avant la pandémie.

Par contre, les consommateurs ont réduit leurs achats pour compenser la perte de leur pouvoir d’achat et la hausse de leurs paiements d’intérêt. Le commerce de détail est en repli de 0,6 % en novembre. Les ventes en volume ont baissé dans les épiceries et les magasins d’alcool (- 1,8 %), les centres de rénovation (- 2,9 %) et dans tous les autres magasins (- 1,6 %).

La construction résidentielle a continué de ralentir en novembre pour un quatrième mois consécutif. Le repli de 1,8 % en novembre est le pire depuis le mois de mai, ce qui n’est pas une surprise étant donné que ce secteur est frappé directement par la hausse du coût du crédit.

Des signaux contradictoires

Les huit hausses successives des taux d’intérêt depuis mars 2022 ont commencé à freiner la croissance et continueront de le faire au cours des prochains mois.

« Une grande partie de l’impact des hausses des taux d’intérêt de la Banque du Canada ne s’est pas encore pleinement répercutée sur le pouvoir d’achat des ménages », observe Nathan Janzen, économiste en chef adjoint de la Banque Royale, dans son commentaire. Il est généralement admis que les taux d’intérêt mettent plusieurs trimestres avant d’avoir leur plein effet sur l’économie.

Jusqu’où ira le ralentissement ? C’est difficile à prévoir parce que des signaux contradictoires sont émis par les différents agents économiques.

Les mises à pied et l’augmentation du chômage qui devraient précipiter l’économie en récession ne sont pas encore dans les cartes.

Ainsi, plus de la moitié des entreprises canadiennes ont l’intention d’embaucher en ce début d’année, indique un sondage réalisé par le cabinet de recrutement Robert Half auprès de 1450 cadres supérieurs. Il s’agit d’une augmentation de 40 % du nombre d’entreprises en mode embauche depuis six mois.

Aussi, la moitié des entreprises canadiennes ont révisé à la hausse les augmentations de salaires qu’elles comptent accorder à leur personnel non syndiqué, selon la firme spécialisée en rémunération Normandin Beaudry. Au Québec, les entreprises prévoient augmenter leurs salaires de 4,4 %, la hausse la plus élevée au Canada.

Pour le moment, le scénario le plus probable est une légère hausse ou un léger déclin du produit intérieur brut canadien pendant la première moitié de 2023, avance l’économiste Arlene Kish, de S&P Global Market Intelligence, dans son analyse du PIB de novembre.