Avec tout ce qui se passe dans le milieu de la construction au Québec, disons que le moment est particulièrement bien choisi par Mike Holmes pour venir y mettre son grain de sel.

Vous connaissez le personnage ?

Mike Holmes est un entrepreneur en construction, mais aussi un populaire animateur de télévision au Canada anglais depuis 20 ans. Il a piloté une panoplie d’émissions dans lesquelles il « vient à la rescousse de propriétaires aux prises avec des entrepreneurs sans scrupules, des maisons insalubres et des projets de rénovation qui ont mal tourné », indique son site web makeitright.ca.

Au Québec, Mike Holmes est surtout connu grâce à sa présence sur la chaîne Casa. On l’a vu dans Holmes le fait bien ou Holmes+Holmes. Sa spécialité : corriger des travaux mal faits.

La vedette du petit écran a aussi mis sur pied, en 2012, le programme Holmes Approved Homes, qui se veut un gage de qualité pour les consommateurs. En gros, Mike Holmes noue des partenariats avec des entrepreneurs qui, selon son évaluation, répondent à ses normes élevées. Ceux-ci prennent l’engagement ferme de bien faire les choses. « Make It Right » est d’ailleurs le slogan de l’entrepreneur en salopette. Surtout, des inspecteurs indépendants leur rendront visite à certaines étapes du chantier.

Jusqu’à tout récemment, ce programme n’existait qu’au Canada anglais et aux États-Unis. Voilà qu’il s’amène au Québec.

Comme nous l’a confirmé la vérificatrice générale du Québec en juin, le fait qu’un entrepreneur ait une licence de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) ne veut pas dire grand-chose sur ses compétences. Même si sa mission est justement d’assurer la qualité de la construction.

Lisez « Une licence d’entrepreneur de la RBQ n’est pas gage de qualité, dénonce la VG »

C’est donc dans ce contexte insécurisant que l’entreprise privée de Mike Holmes commence à faire connaître sa garantie de qualité aux consommateurs québécois. La nature a horreur du vide, dit-on.

L’absence d’inspections systématiques sur les chantiers du Québec est un autre problème dont les conséquences coûtent une fortune.

Dans toutes les autres provinces, 100 % des chantiers sont visités par des inspecteurs et gare à celui qui oserait fermer un mur avant d’en obtenir l’autorisation !

La ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, a dit à Radio-Canada qu’elle évaluait l’idée d’adopter un système similaire. Mais les acteurs du milieu craignent que les inspections ralentissent les chantiers, a-t-elle convenu. Comme si la preuve n’avait pas été faite dans les autres provinces que ça fonctionne…

* * *

Les Québécois qui souhaitent mieux dormir lorsqu’ils embauchent un entrepreneur – pour une construction neuve ou des rénovations – peuvent maintenant choisir une des entreprises ayant le sceau « Habitation Approuvée Holmes ». Celles-ci sont accréditées après une enquête minutieuse, notamment auprès des anciens clients, assure David Bond, responsable du développement du programme au pays de la RBQ.

PHOTO FOURNIE PAR DAVID BOND

David Bond, responsable du développement du programme « Habitation Approuvée Holmes » au Québec

Jusqu’ici, quatre entreprises l’ont joint : Timber Block (constructeur de maisons neuves de Mascouche), Signature Couture (spécialiste en rénovations majeures, de Terrebonne), Provek (constructeur de maisons neuves de Granby) et Construction KG2, à Val-d’Or. Quelques noms doivent s’ajouter à la liste d’ici la fin de l’année.

Même si c’est au Québec que le programme de Mike Holmes arrive en dernier – en raison des défis posés par le français –, c’est ici qu’il serait, ironiquement, le plus nécessaire, selon M. Bond.

À son avis, l’industrie de la construction au Québec « est déficiente par rapport au reste du Canada », notamment en raison du manque d’inspections. Il déplore aussi que la RBQ ne donne « pas beaucoup de formation » une fois la licence obtenue. « Ça, c’est un peu un fléau. »

Lisez « La RBQ promet de changer »

Propriétaire de Signature Couture, Jean-François Couture constate que les inspections qui viennent avec le sceau de Mike Holmes rassurent ses clients. « Eux, ils viennent sur nos chantiers pour vrai et l’inspecteur est très compétent. » Ce type de visite, qui ne se fait jamais, indique-t-il, devrait pourtant être « de base » au Québec.

Les entrepreneurs paient jusqu’à 1900 $ pour les inspections et les rapports de non-conformité. La somme peut être incluse ou non dans la soumission remise au client.

Mike Holmes provoque des réactions « très clivantes », raconte David Bond.

« Les “vrais” de la construction au Québec vont dire que Mike bâtit beaucoup trop solidement et qu’il “strippe” tout pour tout refaire à zéro. Bien entendu, j’ai souvent à expliquer que pour faire comprendre le message à la télé, c’est parfois nécessaire de faire un “spectacle”, sinon les gens ne regarderaient pas et, au bout du compte, n’en sauraient pas plus sur la construction. »

Il est beaucoup trop tôt pour évaluer l’incidence du sceau Mike Holmes sur la satisfaction des consommateurs québécois. Mais s’il y a une province où l’ajout d’inspections peut changer la donne, c’est bien ici.