Grande rivale d’Uber en Amérique du Nord, l’entreprise de covoiturage Lyft prépare le terrain pour s’implanter au Québec, a pu confirmer La Presse. Cette multinationale californienne échange avec le gouvernement Legault pour se familiariser avec le cadre réglementaire de la province.

Établie à San Francisco, l’entreprise dont la valeur boursière frôle les 6,7 milliards en Bourse n’a pas répondu à nos questions envoyées par courriel visant à connaître ses intentions à l’endroit du marché québécois, plus précisément dans la région de Montréal. Selon nos informations, il s’agit d’une question de mois avant que les choses se concrétisent.

Signe de l’intérêt renouvelé de Lyft à l’endroit du Québec, son responsable des relations gouvernementales, Doug Mehan, établi à New York, s’est inscrit, vendredi dernier, au registre québécois des lobbyistes. Son mandat est clair : il vise à obtenir « les permis et autorisations nécessaires à l’opération d’un système de transport ». Des discussions sont en cours avec le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) ainsi qu’avec la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).

« Si c’est au bénéfice des usagers et dans le respect de la Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile, la venue d’un nouvel acteur est vue d’un bon œil par notre gouvernement », a indiqué Maxime Roy, directeur des communications de la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, dans une déclaration, en soulignant que la « transparence au niveau du prix » était importante.

Montréal est la seule ville identifiée par Lyft dans son inscription au registre des lobbyistes.

L’entreprise se spécialise dans les services de covoiturage, de location de véhicules, de trottinettes électriques et de livraison de repas. C’est aussi cette entreprise qui avait mis la main, en avril 2022, sur le concept de BIXI, en rachetant PBSC Solutions Urbaines pour 215 millions. Elle était déjà présente dans la métropole dans la foulée de son acquisition de Motivate – un exploitant de vélos en libre-service – en 2018, qui compte un bureau à Montréal, où travaillent une cinquantaine de personnes.

Mardi, il n’avait pas été possible de savoir quel serait l’éventail de services offerts par la multinationale dans la province. Ailleurs au pays, Lyft est présente en Ontario, en Alberta (Calgary et Edmonton) ainsi qu’en Colombie-Britannique (Vancouver).

Contexte différent

L’éventuelle arrivée de Lyft devrait s’effectuer dans un contexte moins tendu par rapport à la percée d’Uber, il y a une décennie. L’industrie du taxi a été déréglementée dans la foulée de la Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile, présentée en 2019. Ce changement a permis de régulariser des plateformes comme Uber.

Seuls les véhicules désignés comme des taxis peuvent continuer d’être hélés par un client et cueillir des clients à des postes d’attente précis, notamment. Le régime des permis de taxi a quant à lui été aboli. Dans la région montréalaise, Lyft s’installerait dans un environnement concurrentiel où l’on retrouve déjà Uber ainsi que Taxelco, également propriétaire des enseignes Taxi Diamond et Taxi Hochelaga. Dans l’industrie, l’intérêt de Lyft envers le marché québécois ne surprend pas.

« Je pense que ça sera plus risqué pour Uber, explique un acteur majeur de l’industrie de la région de Montréal, qui demande à ne pas être nommé. C’est la stratégie de Lyft. Ils arrivent toujours après qu’Uber a défriché le marché. Je ne tombe pas des nues. »

Selon le site spécialisé dans le créneau du covoiturage Gridwise, la rémunération horaire globale offerte par Uber (21,14 $ US) était supérieure à celle de Lyft (19,90 $ US) en 2022. Ce site spécialisé n’a pas encore effectué la comparaison pour l’an dernier.

Ce n’est pas la première fois que le rival nord-américain d’Uber a les yeux rivés sur le Québec. Les médias de Québecor avaient évoqué l’intérêt de la multinationale en 2018. Rien ne s’était matérialisé à l’époque.

Deux nouveaux acteurs ?

Lyft pourrait avoir de la compagnie en s’installant au Québec en 2024. Un concurrent européen, Bolt, qui est présent dans plus de 500 villes dans le monde entier, souhaite aussi étendre ses activités dans la métropole. Le nom de cette entreprise établie en Estonie vient également d’apparaître au registre québécois des lobbyistes.

Il y a cependant une différence notable entre Bolt et les deux autres services de covoiturage (Uber et Lyft) : la plateforme européenne n’a pas encore effectué de percée en Amérique du Nord. Elle risque d’avoir du pain sur la planche dans un marché où Uber et Lyft s’affrontent.

Selon l’inscription de Bolt, rendue publique jeudi dernier, le service souhaite « planifier l’implantation de services de transport automobile à Montréal ». Les démarches de Bolt doivent s’effectuer auprès du MTMD, de la SAAQ ainsi que de la Commission des transports du Québec.

Lyft en bref

  • Année de lancement : 2012
  • Siège social : San Francisco
  • Présence géographique : près de 660 villes au Canada et aux États-Unis
  • Revenus (2023) : 4,4 milliards US
  • Perte nette : 340 millions US
En savoir plus
  • 16,66 $ US
    Valeur de l’action de Lyft, mardi, à la clôture du NASDAQ.
    nasdaq
    2019
    Année où Lyft est entrée en Bourse.
    lyft