Qu'il s'agisse des nombreux sites internet offrant du tutorat à 50$ l'heure, de numéros de téléphone d'enseignants échangés aux abords des écoles ou de cahiers vendus en librairie, la préparation aux examens d'admission est devenue une véritable industrie.

Philippe l'a réalisé lorsque son fils aîné était en 6e année. Lorsque Alexis a voulu voir ses amis, au retour des vacances familiales, en août, ces derniers lui ont tous dit qu'ils ne pouvaient pas sortir parce qu'ils préparaient leurs examens d'admission à l'école secondaire.

«C'est à ce moment-là qu'on a allumé. On a réalisé qu'il fallait faire quelque chose, qu'on était en retard», se souvient le père de famille.

Cet ancien du collège Jean-de-Brébeuf n'était pas convaincu que les cours particuliers étaient indispensables. Mais la pression se faisait sentir. «Une partie du stress des parents vient du groupe. On se demandait ce qui allait arriver si Alexis n'était pas accepté à l'école où iraient tous ses amis», se rappelle-t-il.

Sa conjointe et lui ont fait appel à une tutrice privée. Moyennant 1500$, elle est venue à la maison pour 13 séances de révision de 3 heures chacune.

L'exercice en a valu la peine, croit le père. Alexis est maintenant en troisième secondaire au collège Notre-Dame. Son frère Thomas, en 6e année, suit ses traces avec la même tutrice.

Anxieuse de voir son fils accepté au privé, Nathalie Vincent s'est quant à elle procuré un cahier de préparation à l'examen. Quand son fils aîné, Samuel, a terminé sa 5e année, elle a révisé avec lui pendant l'été. Elle fait maintenant la même chose avec ses jumeaux, Julie-Anne et Alexis, qui sont en 6e année.

«C'est une révision. Mes enfants connaissent la matière et moi, je comble leurs petites lacunes. Je ne voulais pas d'un tuteur privé, c'est contre mes principes. C'est mettre trop de pression sur les enfants», déclare Mme Vincent, ancienne enseignante.

Mylène Ste-Croix a aussi opté pour le cahier vendu en librairie. Elle voulait s'assurer de revoir la matière avec son fils, qui avait été, durant tout le primaire, dans des groupes turbulents et agités. «Je savais que certaines notions n'avaient pas été vues», confie cette enseignante.

Elle voulait surtout que son fils, Théo, apprivoise le déroulement de l'examen. À 11 ans, rares sont les enfants qui ont déjà expérimenté des examens de trois heures avec choix de réponses.

Pendant tout l'été, mère et fils ont revu, petit à petit, le programme de 5e année. Le cahier offrait aussi une simulation d'examen que Théo s'est astreint à faire.

«Je souhaitais lui apprendre à gérer son temps, à gérer son stress et à parcourir rapidement l'examen pour mieux l'évaluer», explique Mme Ste-Croix, qui a aussi fait des exercices de visualisation avec son fils.

Aujourd'hui, Théo est en première secondaire au collège Letendre, l'école de son choix. La préparation a été payante, croit sa mère. «Le jour de l'examen, il m'a dit que les questions ressemblaient à ce qu'on avait fait. Il était confiant.»

Mme Ste-Croix n'est pourtant pas certaine qu'elle aurait été en mesure d'aider son fils et de bien lui expliquer les notions si elle-même n'avait pas été enseignante.

Choisir un tuteur ou pas

Luc David, qui offre du tutorat avec sa femme depuis huit ans, n'est pas surpris. «On a commencé à donner du tutorat en raison de la trop grande demande», explique celui qui est aussi enseignant de mathématiques dans une école secondaire privée.

Bien intentionnés, les parents achètent le livre de révision. «Après deux semaines, ils ne se retrouvent plus dans les notions, la routine est difficile à installer à la maison. Alors ils jettent l'éponge et nous appellent», dit M. David.

Il est catégorique. Les parents n'ont généralement pas les ressources et la pédagogie nécessaires pour faire comprendre à leurs enfants les notions qu'ils saisissent moins bien.

Chaque année, dès la troisième semaine d'août, M. David et sa femme accueillent à la maison des groupes de 8 à 10 élèves pour réviser la matière de 5e année. Les parents déboursent 500$ pour 7 séances totalisant 18 heures de cours. Cette formation est profitable: plus de 90% de ses élèves sont reçus à l'école de leur choix, dit M. David.

Directrice du service de mesure et d'évaluation de la firme Brisson-Legris, qui conçoit des examens d'admission, Josée Lambert-Chan affirme pour sa part qu'il n'est pas nécessaire de trop en faire.

Les élèves sont évalués sur des notions qu'ils ont apprises et qu'ils maîtrisent, rappelle-t-elle.

Certains parents ont trop d'exigences. «Ils ne se contentent plus de montrer à leurs enfants à nager dans ces eaux-là; il faut qu'ils apprennent à nager plus vite, de plus en plus vite, pour se retrouver dans le peloton de tête et, éventuellement, sur le podium.»

Pendant que des milliers d'élèves de 6e année se préparent à passer les examens d'admission au cours des prochains jours, des jeunes de 5e année se lancent pour leur part dans le magasinage des écoles. De nombreuses écoles secondaires, tant privées que publiques, organisent des portes ouvertes au début de l'automne pour faire connaître leurs particularités et attirer de nouveaux élèves.