Au moment où des « risques de protectionnisme » l’inquiètent aux États-Unis, le premier ministre François Legault veut voir les échanges économiques entre le Québec et la France augmenter significativement au cours des prochaines années.

« Si on inclut les importations et les exportations, ce sont six milliards d’échanges entre le Québec et la France par année. Ce n’est pas assez. On a besoin de diversifier nos exportations. 70 % de nos exportations vont aux États-Unis et peu importe qui sera élu l’automne prochain, il y a des risques de protectionnisme », a fait valoir vendredi M. Legault, devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).

À ses côtés, le premier ministre français Gabriel Attal, qui concluait sa visite au Canada et au Québec, a fait valoir que la France « s’est transformée » dans les dernières années pour faire plus de place aux entreprises. « En 2017, les impôts aux entreprises étaient d’environ 33 %. On a aujourd’hui baissé à 25 %, soit au niveau de nos voisins européens », a-t-il noté.

M. Attal a aussi rappelé que la Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), une taxe imposée aux industries, a diminué de cinq milliards en sept ans. « Elle sera à zéro en 2027, puisqu’on supprime cette taxe », a-t-il dit, en promettant au global des baisses d’impôt de 30 milliards pour les entreprises.

« On est le pays d’Europe qui a retrouvé le plus tôt son PIB d’avant-crise », a enfin fait valoir le premier ministre français, qui a insisté sur le fait que l’Hexagone « ne veut pas dépendre de pays où une élection dans un sens ou dans l’autre peut avoir un impact absolument majeur sur les rapports économiques ».

Porte d’entrée à deux sens

Dans son discours, François Legault a lui plaidé « qu’il faut que le Québec soit la porte d’entrée des entreprises françaises pour distribuer en Amérique du Nord ». « Et à l’inverse, il faut que la France soit la porte d’entrée pour les entreprises québécoises en Europe. C’est du donnant-donnant », a-t-il dit, en ironisant sur le fait que « Gabriel [Attal] a acheté ça ».

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François Legault et Gabriel Attal

Une « belle opportunité » se profile d’ailleurs avec Alstom, affirme M. Legault, qui a avancé que « les grandes villes américaines vont avoir à construire des trains, des tramways, des métros ».

« Les deux seuls compétiteurs d’Alstom, c’est Siemens en Allemagne et il y a les Chinois. Il n’y a pas de grands joueurs aux États-Unis. Et ça s’adonne que la Caisse de dépôt est maintenant l’actionnaire le plus important d’Alstom, donc il y a beaucoup d’opportunités », a poursuivi le premier ministre québécois.

C’est certain que la décarbonation va passer par le transport collectif. Il faut travailler ensemble. Je vois ça comme une opportunité.

François Legault, premier ministre du Québec

Gabriel Attal parle aussi de la décarbonation « comme un enjeu majeur », toutes industries confondues. « En France, on veut sortir de la dépendance aux hydrocarbures des grandes puissances. On a vu comment la Russie a utilisé le gaz », a-t-il noté, en déplorant que Moscou « s’en serve pour financer son effort de guerre » en Ukraine.

Oser faire plus ?

« Il va falloir oser, hein, Gabriel ? », a blagué M. Legault, en se montrant entre autres préoccupé qu’il n’y ait « pas de différence de prix entre l’aluminium gris qui vient de la Chine et l’aluminium vert qui vient du Saguenay–Lac-Saint-Jean ».

À ses yeux, le Québec et la France devront être « capables de se dire […] que pour les produits qui viennent de pays où il n’y a pas de normes élevées, il y a un coût qui doit être ajouté au prix payé par les entreprises pour que ça fasse du sens, sinon c’est injuste ».

Le chef caquiste a aussi estimé « important » que le Québec « commercialise davantage sa recherche », en s’inspirant de la France. « Ça ne veut pas dire qu’on met en compétition la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Il faut faire les deux », a-t-il noté.

Ensemble, M. Attal et M. Legault prenaient part vendredi à un panel économique organisé par la CCMM ayant pour thème le « renforcement des échanges commerciaux aux coopérations dans des filières stratégiques » et « les partenariats franco-québécois dans un monde en transition ».