(Ottawa) Le Canada est optimiste quant à la conclusion d’un éventuel traité pour éliminer la pollution plastique d’ici 2040. Le gouvernement estime que la quatrième séance de négociations des Nations unies (ONU) sur la question aura permis de jeter les bases pour la prochaine ronde prévue en novembre en Corée du Sud. Reste que l’incertitude quant à une éventuelle limite de la production de plastique demeure.

Ce qu’il faut savoir

Le Canada est l’hôte de la quatrième session de négociation des Nations unies pour éliminer la pollution plastique d’ici 2040.

Quelque 175 pays sont réunis à Ottawa depuis une semaine pour s’entendre sur un projet de traité.

L’objectif est de conclure un accord d’ici la fin de 2024.

Deux visions s’affrontent : miser sur le recyclage ou réduire en amont la production de plastique.

« Nous n’allons pas terminer ces parties du traité ici parce que ce n’est pas vraiment l’objectif d’aujourd’hui à Ottawa, mais nous sommes au point où nous examinons l’ensemble du cycle de vie des plastiques », a affirmé la secrétaire parlementaire du ministre de l’Environnement, Julie Dabrusin, lundi après-midi.

Elle a affirmé que le Canada était en accord avec une proposition du Rwanda pour que l’ajout d’une cible de réduction de la production de plastique dans le traité fasse l’objet de négociations lors d’une séance intermédiaire entre celles d’Ottawa et de Pusan, en Corée du Sud. Cette proposition appuyée par le Pérou préconise une réduction de 40 % de la production d’ici 2040.

PHOTO PAUL ELLIS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Des déchets flottant sur les rives de l’Angleterre

« On appuie leur proposition pour qu’on en discute », a-t-elle précisé, sans indiquer si le Canada serait en accord avec une telle cible.

La question d’imposer un plafond sur la production de plastique ne faisait pas consensus parmi les 175 pays participants, lundi, et de l’aveu même du ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, il sera difficile à atteindre.

Quelque 460 millions de tonnes de plastique sont produites chaque année sur la planète, une quantité qui va tripler d’ici 2060, selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (UNEP). Le plastique jeté et les microplastiques se retrouvent dans l’environnement, notamment dans les océans.

Le Canada espérait réduire le texte du projet de traité de 70 % afin que les pays arrivent à s’entendre d’ici la fin de l’année. Il était passé de 32 à 77 pages lors de la ronde de négociations précédente à Nairobi, au Kenya. Mme Dabrusin n’était pas en mesure de dire si cet objectif a été atteint à Ottawa, mais elle a indiqué que des passages avaient été éliminés chaque jour.

Incertitude

Tard en après-midi lundi, l’incertitude entourait toujours le déroulement de la dernière plénière prévue en soirée. Un consensus semblait toutefois se dégager sur la tenue d’une session de négociations intermédiaire avant l’ultime conférence prévue en novembre prochain à Pusan.

Lorsque les négociations ont été lancées une semaine auparavant, le Canada espérait s’approcher d’un traité international contraignant.

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Patrick Bonin, porte-parole de Greenpeace Canada

« On voit certaines avancées poindre, mais il y a beaucoup d’incertitudes et l’enjeu central, qui est la réduction de la production du plastique, reste actuellement hautement incertain », a commenté le porte-parole de Greenpeace Canada, Patrick Bonin.

L’organisme souhaite que les négociations à Ottawa mènent à « un objectif juridiquement contraignant de réduction de la production de plastique » d’au moins 75 % d’ici 2040.

On s’enfarge sur des virgules, il y a des pays qui continuent de bloquer et ceux de qui on s’attend de voir du leadership comme le Canada sont loin d’être convaincants et cohérents dans leur position.

Patrick Bonin, porte-parole de Greenpeace Canada

Le ministre Guilbeault a reconnu dans une entrevue à La Presse Canadienne vendredi qu’il sera difficile d’obtenir un plafond sur la production de plastique lors de ces négociations, même si le Canada n’y est pas opposé.

« Je ne pense pas que nous ayons fait suffisamment de travail collectivement pour pouvoir y parvenir, avait-il déclaré. Je ne sais pas comment nous pourrions mettre en œuvre quelque chose comme ça. »

Opposition de pays exportateurs de pétrole

Des pays, dont l’Arabie saoudite et d’autres membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), s’opposent à des mesures plus ambitieuses.

Le Canada mise davantage sur l’interdiction des plastiques à usage unique et l’économie circulaire qui consiste à produire des biens avec moins de ressources, puis à les réutiliser, les réparer et les recycler pour réduire la production de déchets. Au Canada comme ailleurs dans le monde, seulement 9 % des 4 millions de tonnes de déchets de plastique ont été recyclés en 2019, selon le ministère fédéral de l’Environnement et l’UNEP.

Lundi, M. Guilbeault était à Turin, en Italie, pour la rencontre des ministres du G7 responsables du climat, de l’énergie et de l’environnement. Le G7 s’apprête à s’engager à réduire la production de plastique pour mettre fin à cette pollution d’ici 2040 dans son communiqué final, ce mardi. Le groupe des sept pays industrialisés comprend l’Italie, le Canada, la France, l’Allemagne, le Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis.

Des militants des pays du Sud ont mis en garde lundi contre le concept d’économie circulaire qui est mis de l’avant par l’industrie et qui ne réglera pas le problème de la pollution plastique, selon eux. Dorothy Otieno, du Centre pour la justice environnementale et le développement au Kenya, a rappelé que les pays du Sud veulent obtenir un fonds pour leur permettre de gérer la pollution plastique des pays du Nord envoyée chez eux.

Avec La Presse Canadienne et l’Agence France-Presse