(Québec) Le gouvernement Legault a déposé un projet de loi pour « protéger les élus » et « favoriser l’exercice sans entraves de leurs fonctions ». S’il est adopté, les députés, maires et conseillers municipaux pourront obtenir une injonction contre les citoyens qui les harcèlent, avec des amendes pouvant atteindre 1500 $.

« Cette loi prévoit la possibilité pour un élu municipal ou un député de l’Assemblée nationale qui, du fait qu’il est un élu, fait l’objet de propos ou de gestes qui entravent indûment l’exercice de ses fonctions ou portent atteinte à son droit à la vie privée, de demander à la Cour supérieure de prononcer une injonction pour mettre fin à cette situation », a expliqué en chambre la ministre des Affaires municipales Andrée Laforest.

Ce projet de loi est présenté dans un contexte ou près de 10 % des élus municipaux ont quitté leurs fonctions depuis le scrutin de 2021. Québec avait lancé une campagne de sensibilisation, mais croit désormais qu’il faut sévir.

« Nous vivons actuellement une montée de cas d’incivilité, d’intimidation, de harcèlement et de violence auprès des élus, autant municipaux qu’à Québec », a déploré Mme Laforest en point de presse.

Ces comportements nuisent à la qualité du débat public. Ils entraînent des répercussions sur la fonction, ils découragent parfois la participation citoyenne puis affectent certains élus.

La ministre Andrée Laforest

Les recours prévus par la loi peuvent être pris, selon le cas, « par l’élu concerné, par un organisme municipal ou par le directeur général des élections ».

Un élu qui estime qu’il fait l’objet de « propos ou de gestes qui entravent indûment l’exercice de ses fonctions ou portent atteinte à son droit à la vie privée » pourra demander à la Cour supérieure de prononcer une injonction pour mettre fin à cette situation.

La cour pourra ordonner à une personne :

  • De ne pas se trouver dans le bureau de circonscription du député
  • De ne pas se trouver dans les bureaux du cabinet ministériel d’un membre du Conseil exécutif
  • De ne pas se présenter aux séances de tout conseil d’un organisme municipal auquel siège l’élu municipal
  • De cesser de communiquer avec l’élu
  • De cesser de diffuser dans l’espace public des propos à son sujet

« Quiconque entrave l’exercice des fonctions d’un élu en le menaçant, en l’intimidant ou en le harcelant de façon à lui faire craindre raisonnablement pour son intégrité ou sa sécurité est passible d’une amende d’au moins 500 $ et d’au plus 1500 $ », précise la loi.

Un citoyen qui fait du tapage dans un conseil municipal pourra également être mis à l’amende. « Quiconque, lors d’une séance de tout conseil d’un organisme municipal, cause du désordre de manière à troubler le déroulement de la séance est passible d’une amende d’au moins 50 $ et d’au plus 500 $ ».

Liberté d’expression

La ministre Laforest ne craint pas que son projet de loi vienne restreindre la liberté d’expression. « On veut arrêter des situations qui perdurent, les propos menaçants, les propos violents », a-t-elle dit.

Cette nouvelle loi s’inscrit dans le cadre d’un « omnibus » municipal d’une quarantaine de pages, où la ministre Laforest vient également exaucer le souhait de la mairesse de Longueuil Catherine Fournier, qui souhaitait pouvoir exiger aux promoteurs une contribution au logement à but non lucratif en retour d’un zonage plus flexible.

« Je suis très heureuse de voir qu’il y a beaucoup d’intérêt pour le zonage incitatif. Maintenant, il nous est apparu nécessaire d’offrir plus de flexibilité dans le zonage incitatif pour permettre encore une fois de s’attaquer à la crise du logement sur plusieurs fronts », a expliqué la ministre.

Catherine Fournier applaudit

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

La mairesse Catherine Fournier s’est réjouie du projet de loi.

Mme Fournier s’en est réjouie : « Je ne peux qu’applaudir ce projet de loi d’Andrée Laforest, qui, en plus de mieux outiller et protéger les élus, permettra aux villes de mettre en œuvre un zonage incitatif gagnant-gagnant », a-t-elle écrit sur les médias sociaux.

Elle veut également saluer la mesure permettant « élus•es de participer à distance aux séances du conseil dans certaines situations ». « Il s’agit d’une avancée importante pour la conciliation politique-famille », a-t-elle souligné.

La Fédération québécoise des municipalités s’est aussi dite très heureuse du projet de loi. « La FQM note avec intérêt la modification législative proposée pour que les élus·es municipaux, à l’instar des députés, puissent obtenir le soutien nécessaire lorsqu’ils sont cités à comparaître dans une enquête ou lors d’une préenquête dans le cadre de leurs fonctions », affirme le regroupement municipal.