(Ottawa) La députée conservatrice Rachael Thomas s’est attiré les foudres de ses collègues après avoir demandé à la ministre Pascale St-Onge de répondre à ses questions en anglais lors d’une réunion d’un comité de la Chambre des communes. L’élue albertaine a présenté ses excuses par la suite.

Rachael Thomas a l’habitude de semer la zizanie au Comité permanent du patrimoine canadien – elle a déjà promis qu’elle en ferait un « enfer ».

Elle a encore frappé jeudi, provoquant l’ire des libéraux, des bloquistes et des néo-démocrates après avoir prié Mme St-Onge, deux fois plutôt qu’une, de lui répondre dans la langue de Shakespeare.

« J’ai remarqué que vous répondiez à mes questions en français, mais que vous répondiez en anglais aux autres questions en anglais si elles viennent de vos collègues libéraux », a-t-elle commencé.

« Je suis consciente que c’est entièrement votre choix, nous sommes un pays bilingue, mais si c’était possible pour vous, j’apprécierais… », a-t-elle enchaîné sans pouvoir terminer sa requête de façon audible.

Elle a été enterrée par les cris de protestation qui ont fusé de toutes parts : « That’s not appropriate », « C’est ridicule, ça », a-t-on entendu.

« Est-ce que tout le monde peut, s’il vous plaît, cesser de crier ? Il y a au moins cinq personnes qui crient pour faire un rappel au règlement ! », est intervenue la présidente du Comité, Hedy Fry.

« C’est insultant pour les Québécois [et] pour les francophones », s’est désolé le bloquiste Martin Champoux.

Le néo-démocrate Peter Julian a ajouté sa voix au concert de critiques. « Que les conservateurs remettent en question le bilinguisme est absolument répréhensible », a lâché l’élu bilingue de la Colombie-Britannique.

La députée Rachael Thomas a réitéré sa demande, et une fois la tempête calmée, la ministre lui a répondu en français, disant vouloir être « certaine d’utiliser le bon vocabulaire ».

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge

Les travaux parlementaires à Ottawa se déroulent dans les deux langues officielles du Canada.

L’interprétation simultanée est offerte lors des activités des comités de la Chambre des communes, ainsi que lors de la majorité des conférences de presse.

« Speak White »

La ministre Pascale St-Onge n’allait pas laisser passer cette occasion de casser du sucre sur le dos du Parti conservateur.

« Je suis francophone, je viens du Québec, j’ai passé ma vie à défendre la langue française, j’ai étudié la littérature française et québécoise », a-t-elle laissé tomber devant les caméras.

« C’était très déplacé, et très méprisant aussi, à l’endroit des francophones et des Québécois », a-t-elle ajouté, promettant de continuer à parler le français, sa « langue de travail », dans la capitale fédérale.

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, y a vu l’expression d’« une vieille réminiscence de ce bon vieux Ouest canadien, de ce bon vieux Speak White ».

Et avec ce « mépris suintant, les conservateurs se définissent eux-mêmes », a-t-il lâché en point de presse.

Des excuses

La principale intéressée a présenté ses excuses par écrit à la présidente du Comité.

« Je tenais à vous écrire pour m’excuser d’avoir demandé plus tôt aujourd’hui que, si possible, la ministre du Patrimoine canadien réponde à mes questions en anglais », a-t-elle écrit.

« Les conservateurs soutiennent le bilinguisme officiel, la préservation de la langue française au Canada et le droit des Canadiens à communiquer dans la langue de leur choix », a-t-elle assuré.

Sur la plateforme X, jeudi, Rachael Thomas a publié une vidéo de l’échange entre elle et la ministre. Les propos de la ministre sont interprétés et sous-titrés du français à l’anglais.

Une habituée des propos controversés

La députée, qui est porte-parole de son parti en matière de Patrimoine canadien, n’en est pas à sa première intervention controversée devant le Comité.

Le 26 octobre dernier, elle a accusé CBC/Radio-Canada d’être dans le camp du Hamas.

Quelques jours plus tard, alors que le Comité recevait la patronne du diffuseur public, Catherine Tait, elle a accusé celle-ci de mentir.