(Ottawa) Si le Bloc québécois ne s’est pas joint à la délégation de députés qui s’est rendue en Israël il y a quelques jours, c’est parce que cela aurait envoyé un message contraire à celui d’un appel à la paix, a expliqué mardi le chef Yves-François Blanchet.

« Je crois qu’en ce moment, cela aurait pu envoyer un message que nous ne sommes pas prêts à envoyer », a argué le dirigeant du Bloc en marge d’une annonce sur la lutte contre les discours haineux et antisémites, en fin de matinée.

« La simple présence de députés se rendant en Israël dans le contexte actuel risquerait de ne pas être vue comme un appel à la paix. Je ne souhaite à ce stade-ci cautionner rien d’autre que, justement, un appel à la paix », a-t-il enchaîné.

Cinq députés – deux libéraux et trois conservateurs – ont effectué une visite en Israël la semaine dernière. La visite de trois jours, qui s’est déroulée du 20 au 22 novembre, comprenait des rencontres avec des survivants des attentats perpétrés par le Hamas le 7 octobre ainsi qu’avec des élus locaux, entre autres.

Les frais du voyage ont été payés par la UJA Federation of Greater Toronto, a indiqué mardi le député libéral Anthony Housefather, qui était de la partie. Il a également noté que le but de la visite était de démontrer la solidarité du Canada envers un pays allié.

En plus du député Housefather, le libéral Marco Mendicino et les conservateurs Melissa Lantsman, Marty Morantz et Michelle Rempel Garner étaient du voyage.

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) n’y a pas dépêché de représentant. Le parti, qui réclame un cessez-le-feu comme le Bloc québécois, n’a pas donné suite aux multiples demandes faites la semaine dernière par La Presse sur les raisons derrière la décision de n’envoyer aucun membre de sa députation.

Exemption religieuse : Trudeau ouvert

PHOTO SPENCER COLBY, LA PRESSE CANADIENNE

« Nous allons regarder le projet de loi […] pour regarder si effectivement ça peut aider à lutter contre la haine et l’incitation à la violence. C’est un enjeu complexe, mais on est là pour travailler de façon constructive pour protéger les Canadiens », a signalé le premier ministre Justin Trudeau.

Le chef du Bloc a commenté cette visite alors qu’il avait convoqué la presse pour discuter du dépôt de son projet de loi d’initiative parlementaire. En vertu de celui-ci, le Code criminel serait amendé afin de retirer l’exemption religieuse au discours haineux et antisémite qui permet d’éviter une infraction pénale.

À la période des questions, le premier ministre s’est montré ouvert à discuter de la mesure législative C-367.

« Nous allons regarder le projet de loi […] pour regarder si effectivement ça peut aider à lutter contre la haine et l’incitation à la violence. C’est un enjeu complexe, mais on est là pour travailler de façon constructive pour protéger les Canadiens », a signalé Justin Trudeau.

« Je reçois cela avec un enthousiasme prudent ; j’espère qu’on arrivera rapidement à quelque chose, a réagi Yves-François Blanchet. Il faut s’entendre : le projet de loi est tout bref ; il suffit de retirer des exceptions, deux articles, du Code criminel. »

À l’heure actuelle, le fait d’attiser la haine contre un « groupe identifiable » et de fomenter « l’antisémitisme en cautionnant, en niant ou en minimisant l’Holocauste » constitue une infraction au sens du Code criminel du Canada.

Or, dans un cas comme dans l’autre, il existe une exemption fondée sur la religion : nul ne peut être déclaré coupable s’il « a de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit », selon la loi.

Le Parti conservateur et le NPD n’ont pas commenté le projet de loi. Les débats pourraient mettre un certain temps avant de se mettre en branle à la Chambre des communes, comme c’est le cas pour la vaste majorité des projets de loi émanant de députés.

La GRC enquête sur Charkaoui

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Le prédicateur Adil Charkaoui

Il y a environ deux semaines, en Chambre, Yves-François Blanchet avait soulevé le problème en évoquant le discours du prédicateur Adil Charkaoui.

Le 28 octobre dernier, à Montréal, l’imam avait harangué la foule en s’exclamant, en arabe : « Allah, charge-toi de ces agresseurs sionistes. Allah, charge-toi des ennemis du peuple de Gaza. Allah, recense-les tous, puis extermine-les. Et n’épargne aucun d’entre eux ! »

Une plainte a été déposée contre lui, et l’enquête est en cours. « La Gendarmerie royale du Canada (GRC) au Québec enquête bien sur les propos tenus par M. Charkaoui. À l’heure actuelle l’enquête se poursuit, et il n’y a eu aucune arrestation », a indiqué mardi dans un courriel le sergent Charles Poirier.