(Regina) Le projet de loi qui encadre l’utilisation des pronoms par les jeunes trans dans les écoles de la Saskatchewan a été adopté vendredi à l’Assemblée législative.

La nouvelle loi interdit donc aux jeunes de moins de 16 ans de changer de prénom ou de pronoms à l’école sans avoir obtenu au préalable l’accord de leurs parents.

Le gouvernement du Parti saskatchewanais avait convoqué l’Assemblée législative pour une séance extraordinaire afin d’adopter ce projet de loi. Il a eu recours à la disposition de dérogation de la Charte canadienne des droits et libertés pour passer outre à certains articles de la Charte et du Code des droits de la personne de la Saskatchewan.

« Cela donne aux parents le droit de participer à l’éducation et à la vie de leur enfant », a déclaré vendredi le premier ministre Scott Moe, après le vote final.

Le gouvernement soutient que cette loi vient officialiser, en fait, des politiques déjà en place dans la plupart des districts scolaires et qu’elle garantit que les parents sont informés au sujet de leurs enfants.

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Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe

Il soutient également que la loi protège les élèves, car elle exige du personnel de soutien scolaire qu’il s’implique si un enfant craint de subir un préjudice physique, émotionnel ou mental lorsque ses parents seraient mis au courant pour obtenir leur consentement.

Le gouvernement Moe a décidé d’intervenir après avoir appris, l’automne dernier, qu’un district scolaire adoptait une politique interdisant d’informer les parents dans les cas où l’enfant ne voulait pas, a déclaré Dustin Duncan, ministre de la Société d’investissements de la Couronne.

« Cela a été porté à mon attention pour la première fois par des enseignants qui n’étaient pas à l’aise avec cette orientation », a déclaré M. Duncan.

Mais la décision du gouvernement a été critiquée par de nombreux groupes, notamment le syndicat provincial des enseignants.

« L’adoption aujourd’hui du projet de loi 137 place tous les enseignants de la Saskatchewan dans une position difficile : doivent-ils obéir à la loi, plaçant ainsi potentiellement un enfant dans une position extrêmement dangereuse, ou l’ignorer et s’exposer à des risques judiciaires », a écrit la Fédération des enseignants de la Saskatchewan sur les réseaux sociaux.

Droits des mineurs c. droits des parents

Le projet de loi a également été critiqué par la Commission des droits de la personne de la province, qui estime que le recours à la disposition de dérogation pour contourner le Code provincial des droits de la personne affecte considérablement les droits des mineurs.

Des professeurs de droit de l’Université de la Saskatchewan ont aussi exhorté le gouvernement à agir plus lentement et à laisser les arguments juridiques s’exprimer.

L’opposition néo-démocrate s’est opposée au projet de loi, affirmant qu’il privait de leurs droits des personnes vulnérables. « Les enseignants devront choisir entre renvoyer des enfants dans le placard ou les mettre en danger », a déclaré la cheffe du NPD, Carla Beck.

Le premier ministre Moe a déclaré vendredi qu’il était contre le fait de laisser les parents dans l’ignorance. « En quoi le fait de cacher ces informations au parent aide-t-il l’enfant ? En quoi le fait de cacher ces informations, concernant une décision très importante à laquelle un enfant est confronté, aide-t-il à soutenir cet enfant de quelque manière que ce soit ? »

Le gouvernement de la Saskatchewan a annoncé cette politique pour la première fois cet été.

Les avocats de « UR Pride », un organisme LGBTQ de Regina, ont ensuite obtenu une injonction du tribunal jusqu’à ce qu’une contestation judiciaire puisse être entendue sur le fond plus tard cette année. Dans leur requête, ils ont plaidé que cette politique violait les droits garantis par la Charte canadienne et qu’elle pourrait amener des enseignants à « sortir de force des jeunes du placard » ou à les mégenrer en classe.

Le gouvernement a déposé son projet de loi la semaine dernière, en recourant à la disposition de dérogation.

Bennett Jensen, un avocat d’« UR Pride » et directeur juridique chez Égale Canada, a déclaré que son équipe déterminerait les prochaines étapes dans les jours à venir.

« Le gouvernement pourrait très bien choisir de présenter des arguments sur la poursuite ou non de la contestation, mais pour l’instant, elle suit son cours, a déclaré Me Jensen. Et nous pourrions maintenant faire valoir des arguments autour du recours à la disposition de dérogation elle-même. »