(Québec) La ministre Suzanne Roy hérite du dossier de l’identité de genre. Elle dévoilera en décembre les membres qui composeront un « comité de sages » sur la question. Dans un premier temps, elle assure que son objectif « n’est pas d’enlever des droits à personne ».

Le premier ministre François Legault a dévoilé mercredi que la ministre de la Famille allait piloter le dossier de l’identité de genre, qui crée beaucoup de vagues depuis les manifestations la semaine dernière de One Million March for Children, un groupe composé de militants musulmans conservateurs, de membres de la droite religieuse et de sympathisants du « convoi de la liberté », et des contre-manifestations organisées par ceux qui défendent les droits des personnes trans et non binaires.

Dans une mêlée de presse au Parlement, avant la période des questions, Mme Roy a affirmé qu’elle reconnaît la notion scientifique d’identité de genre, qui est d’ailleurs documentée et étudiée par des politiques ministérielles et gouvernementales au Québec. Cela dit, elle a ajouté qu’on « peut avoir des opinions diverses » sur le sujet, mais aussi des inquiétudes.

Dans ce contexte, le mandat qu’elle détaillera en décembre, au même moment où elle présentera les « sages », en sera un « d’ouverture, de respect des différentes perspectives », afin de « prendre le temps de regarder ce qui se fait ici et ce qui se fait ailleurs […] pour discuter de ces enjeux, qui sont importants, de façon sereine ».

« On ne repartira pas à zéro »

Suzanne Roy a également assuré mercredi que Québec ne fera pas table rase de tout le travail qui a déjà été fait, notamment par l’équipe gouvernementale du Bureau de lutte contre l’homophobie et la transphobie.

La ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, qui est responsable de ce bureau, a expliqué qu’elle ne pilotait pas le comité des sages pour être en mesure d’exprimer, en toute indépendance, les notions sur l’identité de genre.

« On ne repartira pas à zéro. Quand je dis qu’on va faire l’état des lieux, on va entre autres justement travailler avec ce qui a déjà été fait et voir ce qui se fait ailleurs pour se donner, vraiment, un cadre pour pouvoir se projeter dans l’avenir », a ajouté Mme Roy.

La ministre de la Famille s’est présentée mercredi en mêlée de presse comme une mère et une grand-mère qui sait écouter les autres. Elle a affirmé qu’il y avait eu, lors des manifestations de la semaine dernière, des personnes aux positions extrêmes des deux côtés.

« Mais la question n’est pas là. Je ne suis pas là pour juger la manifestation. Ce que je vous dis, par contre, c’est qu’on doit être capable d’avoir la maturité de discuter des enjeux comme [ceux-là] dans le respect », a-t-elle martelé.

Qui est sage ?

Questionnée si des personnes trans ou non binaires allaient siéger au comité des sages, puisque les travaux concerneront leur vécu, Suzanne Roy a répondu qu’il ne s’agissait pas d’un comité de représentation.

« Des sages, ça devra être des gens crédibles. Crédibles de par ce qu’ils ont fait et de par ce qu’ils sont. Alors [ils seront] des gens réfléchis, et je dirais des gens ouverts », a-t-elle dit.

La question de l’identité de genre provoque plusieurs débats dans l’ensemble du pays. La Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick ont récemment adopté des politiques pour empêcher les jeunes trans et non binaires de changer de pronom ou de nom à l’école sans avertir leurs parents. Les deux provinces affirment qu’elles pourraient utiliser la clause dérogatoire pour mettre leur politique à l’abri des contestations judiciaires.

L’identité de genre, expliquait récemment le sociologue et sexologue Martin Blais, titulaire de la Chaire de recherche sur la diversité sexuelle et la pluralité des genres de l’UQAM, est « un sentiment subjectif, qui est propre à chaque personne et qui renvoie au sentiment d’être un homme, une femme, de n’être ni un homme ni une femme, d’être parfois un homme, parfois une femme. C’est un sentiment intérieur profond relativement stable d’être d’un genre, de plusieurs genres ou d’aucun genre. »