(Ottawa) Que s’en va faire Justin Trudeau au sommet Global Citizen NOW, à New York, à peine trois semaines après avoir sabré 15 % dans l’aide internationale au budget fédéral ? Une coalition d’ONG se pose la question, y voyant une incohérence. Les conservateurs et les néo-démocrates s’y sont aussi opposés, pour des raisons différentes.

Le premier ministre s’envole ce mercredi après-midi en direction de New York, où il sera l’un des invités de ce sommet qui se met en branle jeudi. L’évènement vise à « établir un programme d’action mondial sur les problèmes les plus urgents auxquels l’humanité et la planète sont confrontées », selon Global Citizen.

Il est au programme de la première journée d’activités, alors qu’il participera à une discussion sur l’égalité des genres animée par la journaliste Lisa LaFlamme en compagnie de Jacqueline O’Neill, l’ambassadrice du Canada pour les femmes, la paix et la sécurité.

« On se demande un peu ce qu’il va faire à New York alors qu’on a pris une décision claire : qu’on revenait à nos niveaux de 2019 et qu’on coupait l’aide internationale de 1,3 milliard par année », dit Louis Bélanger, directeur du regroupement d’ONG Au-delà de nos frontières.

« Je parle à des ONG sur le terrain qui le sentent. L’impact est réel ; les ONG canadiennes se demandent s’ils vont mettre des gens qui sont sur le terrain à la porte. Ça va avoir un impact sur l’éducation des jeunes filles, sur les migrants, sur nos actions par rapport aux changements climatiques », se désole-t-il.

Et donc, « ce qu’on veut, ce n’est pas nécessairement un premier ministre qui va à New York avec des acteurs, des influenceurs et des musiciens », mais bien « un premier ministre qui a une vraie vision, un vrai plan de match pour les affaires étrangères », plaide Louis Bélanger, un ancien employé libéral.

Dans son budget déposé le 4 avril dernier, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, a alloué près de 6,9 milliards en aide au développement international au cours de la prochaine année fiscale, ce qui représente une diminution de 16 % par rapport à l’an dernier.

Mieux que la chaise vide, dit Oxfam-Québec

Dans le communiqué de presse gouvernemental annonçant la présence de Justin Trudeau au sommet, on note qu’il « défendra les droits des femmes, notamment en ce qui concerne la santé sexuelle et reproductive et les droits connexes, ainsi que le renforcement de l’autonomie des femmes aux quatre coins du globe ».

La directrice générale d’Oxfam-Québec, Béatrice Vaugrante, n’est pas « choquée » de sa présence au sommet.

« Je suis de l’école que plus on parle sur toutes les plateformes possibles de l’importance de l’engagement international de défendre les droits des femmes qui sont largement attaqués partout sur la planète à des publics qui sont différents, moi, je dis go », explique-t-elle.

Les discours doivent cependant être suivis par des actions concrètes, insiste-t-elle : « On a eu une baisse de budget, et on s’attend vraiment, maintenant, à des engagements », surtout à la lumière de « l’ensemble des attaques qui se font sur la planète entre autres, sur les droits des femmes ».

Le président français Emmanuel Macron figure aussi parmi les invités de l’évènement, qui réunira aussi des personnalités comme le chanteur John Legend et l’actrice Katie Holmes. On s’attend également à ce que l’acteur Hugh Jackman et le chanteur de Coldplay, Chris Martin, coprésidents du sommet, soient de la partie.

Poilievre critique en chanson

L’avion du premier ministre Trudeau est parti d’Ottawa en fin d’après-midi.

Peu avant l’heure prévue du décollage, lors de la période des questions en Chambre, le chef conservateur Pierre Poilievre a aussi critiqué ce voyage, se fendant de la chanson New York, New York en interpellant Justin Trudeau pour lui demander s’il allait payer pour son hébergement dans la Grosse Pomme.

Il est interdit de pousser la note pendant les séances, l’a grondé le président de la Chambre.

Le leader néo-démocrate Jagmeet Singh s’est aussi élevé contre la décision du premier ministre d’aller à New York, mais pour une autre raison : la grève des 155 000 fonctionnaires fédéraux, qui paralyse la prestation de services pour les Canadiens.

Il lui a ainsi demandé de faire une croix sur le sommet Global Citizen NOW, une requête à laquelle son interlocuteur n’a pas accédé.